Directeur général adjoint de Wienerberger France depuis 2016, Frédéric Didier a été nommé directeur général en septembre 2020. Il a auparavant travaillé chez LafargeHolcim et Equiom.
Rentrée chargée pour Wienerberger. Le fabricant allemand de matériaux de construction (16 619 collaborateurs, 187 sites industriels dans le monde, 3,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2020), est spécialisé dans les briques de structure en terre cuite pour le mur, les tuiles en terre cuite pour la couverture, les briques de façade et les solutions de bardage en terre cuite. Depuis son usine de Durtal (Maine-et-Loire) il lance NaturBric, une brique dont la fabrication est assurée entre 10% et 15% avec un combustible issu de la biomasse. Autre enjeu, la préparation de l’entreprise à la nouvelle réglementation environnementale RE2020, dans un contexte de sortie de crise.
L’Usine Nouvelle. – La crise sanitaire a profité au marché de la rénovation l’année dernière en France. Dans quelle manière en avez-vous bénéficié ?
Frédéric Didier. – A l’issue du premier confinement, la reprise économique a été très forte. Aujourd’hui encore, l’activité reste soutenue. Nous bénéficions de la tendance favorable à la rénovation, en particulier sur nos produits de couverture. Les Français ont initié la rénovation de leurs toitures. En France, le marché de la couverture est lié à la rénovation à 70%, et de 30% pour des bâtiments neufs (maisons).
La tuile terre cuite amène de la durabilité, de l’esthétisme, et permet d’y adjoindre une isolation en sous-toiture afin d’améliorer la performance énergétique et thermique. Il y a aussi l’envie de logements confortables, avec un désir de maisons individuelles qui est bien orienté également. Nous avons adapté au maximum nos équipes. Nous sommes en feu continu, hors maintenance, jour et nuit, et nous avons augmenté le nombre de postes.
Comment vous adaptez-vous aujourd’hui aux tensions sur les matières et l’énergie ?
Nous sommes confrontés à l’inflation des matières premières, en premier lieu de l’énergie. Nous travaillons bien entendu à la réduction de nos consommations. Depuis 2020, nous avons opéré des ajustements de prix assez modérés, mais nous reverrons nos tarifs d’environ 8,5% supplémentaires, en hausse moyenne pondérée, tous produits confondus, en janvier 2022. Il s'agit de tenir compte de l’inflation des matières premières et de l’énergie. Pour les palettes, nous devons assurer un sourcing plus large. Nous avons légèrement rallongé nos délais de production sur certaines tuiles face à la forte demande du marché. Les tuiles faiblement galbées sont les plus concernées.
Nous voulons tendre vers la neutralité carbone d’ici à 2050.
Cette hausse des prix de l’énergie vous incite-t-elle à accélérer votre transition environnementale ?
Nous voulons tendre vers la neutralité carbone d’ici à 2050. Nous allons réduire nos émissions de 15% entre 2020 et 2023 à l’échelle du groupe. En France, nous avons 100% d’électricité d’origine verte sur l’ensemble de nos sites, dont 15% d’éolien. Nous cherchons aussi à optimiser nos produits. Nous travaillons à l’installation de chaudières biogaz, à la production de gaz de synthèse, issu d’une décomposition de certaines matières de bois impropre à des usages plus nobles, et à la récupération de chaleur fatale. Nous travaillons aussi à l’usage de l’hydrogène.
Quelles sont les innovations apportées en la matière par vos nouveaux produits ?
Naturbric, que nous avons lancé en avril 2021 depuis notre site de Durtal (Maine-et-Loire), constitue une première dans le groupe. L’intérêt est de pouvoir proposer une solution de maçonnerie individuelle, plus légère, proposée sur des palettes en bois recyclées, avec des housses recyclables issues de plastiques à 100% recyclés. L’empreinte carbone est réduite de 30% par rapport à une maçonnerie de type B, c’est-à-dire une maçonnerie standard en maison individuelle.
Nos nouvelles briques de façade, Eco-Brick, génèrent 30% de CO2 en moins au mètre carré.
Sur le site de Durtal, nous bénéficions de 10% à 15% de gains énergétiques liés à l’utilisation de biomasse, en contribuant à l’utilisation de produits issus d’autres filières, comme la papeterie, les céréales, les sciures de bois… Nos nouvelles briques de façade, Eco-Brick, génèrent pour leur part 30% de CO2 en moins au mètre carré. Nous travaillons sur la masse du produit, son épaisseur, ses matières premières et le process. Nous utilisons des argiles moins riches en calcaire. Ces briques, fabriquées en Belgique, sont disponibles depuis septembre 2021 en France. Nous envisageons d’en produire aussi à Flines-lez-Raches (Nord).
Vos produits sont-ils prêts pour coller aux exigences de la RE2020 ?
La RE2020 va entrer en vigueur au 1er janvier pour la maison individuelle et au 1er juillet pour le logement collectif. La brique en terre cuite répond aux deux premiers seuils (2022 et 2025) de la RE2020, donc elle sera adaptée jusqu’en 2028 au nouveau cadre réglementaire. Nous travaillons sur des engagements très forts, en investissant dans des solutions techniques pour pouvoir réduire l’empreinte carbone de nos produits : biogaz, gaz synthétique, récupération de chaleur fatale, hydrogène à moyen terme…
La solution brique en terre cuite répond depuis très longtemps à la partie thermique (RT2012). Le bois utilisé dans la construction ne vient majoritairement pas de France, contrairement à la terre cuite. Nous avons un maillage d’usines sur le territoire. Le bois est très intéressant pour les charpentes. Pour la structure et les murs, les solutions brique terre cuite sont locales.