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26/01/2020

Une brique vivante qui peut se reproduire !

La production de ciment est l'une des industries les plus polluantes au monde. Et malgré les efforts déployés par les industriels du secteur, cela peine à changer. Mais des chercheurs tiennent peut-être le bon bout. Ils ont développé une stratégie qui leur permet de fabriquer des briques vivantes qui se reproduisent et qui, au lieu d'émettre du CO2, le consomment.

La maison du futur, certains l'imaginent ultra-connectée. Une maison intelligente qui nous assiste dans toutes les tâches du quotidien. Une maison plus pratique et plus confortable. Une maison plus verte aussi, car plus économe en énergie, surtout. Mais pour aller encore un peu plus loin, d'autres travaillent à développer des solutions d'écoconstruction.

Et du côté de l'université du Colorado à Boulder (États-Unis), des chercheurs dévoilent aujourd'hui leur stratégie en la matière. Elle vise à utiliser des bactéries pour développer des matériaux de construction qui vivent et qui se reproduisent, tout en présentant une empreinte carbone meilleure que celle des matériaux traditionnels. En effet, aujourd'hui, la fabrication du ciment et du béton ne génère pas moins 6 % des émissions annuelles mondiales de CO2.

Ce que les chercheurs de l'université du Colorado proposent, c'est d'inoculer des colonies de cyanobactéries du genre Synechonoccus dans une solution de sable et d'hydrogel. Ces organismes vont alors s'appuyer sur la lumière du soleil, des nutriments et du CO2 pour se développer et produire du carbonate de calcium. De quoi déclencher la minéralisation de l'hydrogel qui se lie alors au sable, formant... une brique !

Des moules dans lesquels se fabriquent les briques vivantes des chercheurs de l’université du Colorado à Boulder (États-Unis) après que la solution contenant les cyanobactéries a été portée à 30 °C.


Vers des maisons qui interagissent avec leur environnement
Les premiers tests réalisés par les chercheurs montrent que les briques ainsi formées présentent une résistance à la fissuration supérieure à celle du mortier traditionnel. « Vous pouvez marcher dessus et ça ne se casse pas », assure Wil Srubar, chercheur à l'université du Colorado dans un communiqué. Et entre 9 et 14 % des colonies bactériennes utilisées étaient toujours en vie après 30 jours et trois générations passées sous forme de brique. Un exploit lorsque l'on sait que les bactéries que l'on trouve dans les ciments autocicatrisants actuels présenteraient une viabilité inférieure à 1 % seulement, sur la même période.

De quoi donc imaginer faire se reproduire les matériaux. Partiellement, du moins. En coupant une brique en deux, chaque moitié -- replongée dans le même mélange de sable et d'hydrogel -- est capable de reformer une brique entière. « Les bactéries se développent à un rythme exponentiel. Si nous parvenions à cultiver nos matériaux biologiquement, nous pourrions donc fabriquer à un rythme exponentiel », explique Wil Srubar.

Si nous parvenions ? Oui, parce qu'il reste encore aux équipes de l'université de Boulder et à leurs partenaires pas mal de travail à accomplir. Notamment pour améliorer la solidité du matériau biosourcé qui présente pour l'heure la résilience d'un ciment à faible résistance. Mais aussi pour surmonter la difficulté suivante : leurs cyanobactéries ont besoin de conditions humides pour survivre. Le procédé n'est donc, pour l'instant, pas applicable dans des régions sèches. Mais les chercheurs envisagent déjà de concevoir des bactéries plus résistantes.


Nous n’en sommes qu’aux débuts de cette technologie
« Nous n'en sommes qu'aux débuts de cette technologie. À l'avenir, les matériaux de construction vivants pourraient être utilisés pour améliorer l'efficacité et la durabilité du secteur. Ils pourraient également permettre aux matériaux de détecter et d'interagir avec leur environnement », déclare Chelsea Heveran, chercheur à l'université de l'État du Montana. Imaginez : des briques qui « guériraient » elles-mêmes leurs fissures, mais surtout des briques qui aspireraient les toxines ou encore, des briques qui pourraient briller sur commande. Ce n'est sans doute pas pour demain. Mais peut-être bien pour après-demain !

Source Futura Sciences par Nathalie Mayer

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