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22/10/2018

Roland Besnard veut assurer « la pérennité de Bouyer Leroux »

Le groupe Bouyer Leroux, sous la direction de Roland Besnard, n’en finit plus de grandir. Le spécialiste français de la brique cherche à consolider ses bases.

Le groupe Bouyer Leroux, expert de la brique en terre cuite, a racheté Soprofen, entreprise spécialisée dans la fabrication de volets et de portes de garage. Le groupe, dont le siège est à La Séguinière, souhaite s’inscrire dans « une stratégie de développement durable ». Rencontre avec son PDG, Roland Besnard.

Le groupe Bouyer Leroux, expert de la brique en terre cuite, a racheté, mercredi 19 septembre, Soprofen, entreprise spécialisée dans la fabrication de volets et de portes de garage. Le groupe, dont le siège est à La Séguinière (Maine-et-Loire), souhaite s’inscrire dans « une stratégie de développement durable » . Rencontre avec son PDG, Roland Besnard.

Le groupe Bouyer Leroux vient de racheter Soprofen, une entreprise spécialisée dans la fabrication de volets et de portes de garage. C’est signé ?
Oui. J’ai signé le contrat de cession mercredi 19 septembre à Paris. Ce sont 415 personnes qui vont nous rejoindre, répartis sur cinq sites en France et deux en Belgique, avec également une plateforme logistique et le siège social en Alsace. Tout est en très bon état. Il y a eu des investissements importants dans les machines, jusqu’au bout. Soprofen sera une plateforme pour nous développer en Europe, ils vendent déjà en Allemagne et en Suisse. Nous allons recruter un directeur général, quelqu’un de confiance, car le siège est en Alsace.

Depuis quand travaillez-vous sur ce dossier ?
Le patron du groupe Atrya, propriétaire de Soprofen, a décidé de vendre au début de l’année. Il a confié un mandat à une banque d’affaires, nous nous sommes rapidement positionnés. Dans la phase finale, nous étions encore trois industriels. Je suis allé passer une demi-journée dans chacun des sites, j’ai serré les mains des opérateurs, discuté avec eux, et ça s’est très bien passé avec les directeurs d’usines. Dans le même temps, nous avons étudié des milliers de documents pour savoir s’il y avait des points de risque.

Et ensuite ?
Nous avons remis une offre ferme avec description du projet, un prix et des garanties. Cette offre a été cosignée le 13 juillet. Depuis, nous avons aussi recueilli l’avis des comités d’entreprise de Soprofen et Bouyer Leroux. Maintenant, nous attendons celui de l’autorité de la concurrence, mais je ne suis pas inquiet.


Il y a cinq ans, vous rachetiez Imerys Structure, aujourd’hui Soprofen, pourquoi toujours chercher à grandir ?
Un arbre qui ne pousse pas, il végète et finit par mourir. Il nous faut avancer, avoir un projet. Il est important de nous diversifier. La brique ne se vend que sur du logement neuf, ça marche bien. Mais il faut savoir que nous sommes sur un marché très fluctuant : ça peut être + 20 % une année, et - 20 % un peu plus tard. Avec un troisième pied, nous serions mieux équilibrés. Le tout devant rester « manageable ». Soprofen représente un chiffre d’affaires de l’ordre de 120 millions d’euros.

Comment pensez-vous gérer cette croissance ?
En nous appuyant sur les hommes. Je vais continuer à travailler avec les directeurs de sites déjà en place. Nous gardons les hommes, c’est juste un changement de capitaux. Les uns vont profiter des savoir-faire des autres, et réciproquement. Expliquons à ceux qui arrivent le chemin qui est le nôtre : qu’ils aient des idées, les fassent remonter. Je veux libérer la parole et les énergies, et créer de la confiance. Nous avons, chez Bouyer Leroux, la culture du partage des résultats par l’intéressement et la participation. J’ai voulu distribuer le plus de participation possible, déjà lorsque je dirigeais Nicoll. Ça veut dire que nous travaillons bien.

Justement, quels résultats cette année ?
Bouyer Leroux va faire un chiffre d’affaires cette année (du 1er octobre au 30 septembre) de l’ordre de 200 millions d’euros, contre 185 l’an passé. Je ne peux pas donner le montant, mais il va y avoir une très bonne participation. Chez SPPF, le chiffre d’affaires sera supérieur à 40 millions d’euros, probablement 42-43 millions.

« Chez Bouyer Leroux, nous sommes sociétaires, pas rentiers. »

Quel chef d’entreprise êtes-vous ?
D’abord, je suis un homme libre, un dirigeant qui s’intéresse aux hommes et ne cède pas aux effets de mode. J’ai envie de faire des choses et d’en tirer de l’épanouissement. Être le plus riche du cimetière, ce n’est pas mon projet. Ce qui me préoccupe, c’est la pérennité de Bouyer Leroux. Moi, je ne suis que de passage ici. Je souhaite que l’on développe notre culture, pour éviter de la perdre. Je fixerai dans nos statuts que le siège du groupe soit ici, à La Séguinière. J’ai toujours voulu garder notre nom : soyons différents et assumons cette différence. Ici, on a du bon sens.

Il se dit que vous recevez personnellement chaque nouvel embauché.
Oui, c’est vrai. Avec leur parrain ou leur supérieur hiérarchique. Je leur propose que l’on se tutoie : ça permet de chasser les inhibitions liées au formalisme. Ça n’empêche pas d’avoir une hiérarchie, ni le respect. Vous savez, les femmes et les hommes sont intelligents : ils vous donnent au moins ce que vous leur donnez.

Et comment jugez-vous les dirigeants d’aujourd’hui ?
Les grands groupes sont dirigés par des administrateurs, des gens sortis de l’ENA (École nationale d’administration). J’insiste : ce sont des administrateurs, pas des entrepreneurs. Chez eux, tout est aseptisé. Alors qu’ici, chez Bouyer Leroux, nous sommes dans le cadre d’une Scop (lire par ailleurs) . Nous sommes sociétaires, pas rentiers. Ça me semble normal de rendre des comptes. Nous ne devons pas avoir honte d’être des industriels.

Une Scop, pour qui, pour quoi ?
Une Scop est une société coopérative et participative. Concrètement, dans ses entreprises, les salariés sont les associés majoritaires ou ont vocation à le devenir. Ils détiennent au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote. Le partage des profits se doit d’être équitable entre les salariés, les salariés associés et les réserves de l’entreprise. On trouve des Scop de toutes les tailles et dans tous les secteurs de l’économie : le groupe Chèque déjeuner, le zoo d’Amnéville (Moselle), ou Scopelec (groupe spécialisé dans les télécoms en Midi-Pyrénées). Bouyer Leroux est la deuxième Scop industrielle la plus importante de France.

Bouyer Leroux, une histoire d’un siècle et demi
Tout a donc commencé en 1875 à La Séguinière. La commune avait alors à peine 1 600 habitants (contre plus de 4 000 aujourd’hui). Parmi eux, les familles Bouyer et Leroux. Sur leurs terres, de l’argile et du bois. « Avec ça, ils se sont mis à produire des briques et des tuiles. L’entreprise s’est beaucoup développée en 1955, avec les besoins de la reconstruction d’après-guerre », racontait Roland Besnard dans nos colonnes en juin 2016.

1980 marque un tournant : chez les Bouyer comme chez les Leroux, personne n’a les moyens de racheter l’entreprise. « Georges Leroux, le président de l’époque, qui avait une vraie fibre humaniste, a souhaité vendre l’entreprise aux salariés sous la forme d’une Scop. » Deux idées derrière cette volonté : « Assurer la pérennité et l’indépendance de l’entreprise, et récompenser les salariés pour leur travail accompli. »

En 1986, Bouyer Leroux  r achète l’usine de terre cuite Produits rouges de Vendée, à Saint-Martin-des-Fontaines (Vendée). SPPF en 1996, Imerys terre cuite en 2013, Roger-Thébault en 2015, et Fermetures Loire-Océan en 2016.

Source Ouest France par Vincent COTINAT.

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