Deux enfants posent devant cette maison construite à l’aide de blocs DuraBric, à Dwangwa, au Malawi.
Au sommet d’une colline ensoleillée dominant une vallée parsemée d’arbustes, d’herbe sèche et de maïs, Deodat Madembwe observe des maçons en train de fabriquer les briques qui lui serviront à bâtir une école élémentaire.
Maroc, les gens préfèrent les blocs de béton aux blocs de terre. Cela étant dit, les avantages environnementaux de cette méthode ont été reconnus ailleurs en Afrique. En effet, ce type de brique a tant gagné en popularité que LafargeHolcim a démarré la construction d’une usine dans la ville de Lilongwe, la capitale du Malawi, dans le but de lancer leur production en masse : près de 10 000 briques par jour, assez pour construire deux maisons.
Au sommet d’une colline ensoleillée dominant une vallée parsemée d’arbustes, d’herbe sèche et de maïs, Deodat Madembwe observe des maçons en train de fabriquer les briques qui lui serviront à bâtir une école élémentaire.
Madembwe a grandi en Tanzanie centrale, où, jeune homme, il a exercé le métier de maçon. À l’époque, le processus le plus répandu de fabrication des briques consistait à les modeler grossièrement à partir d’argile et de terre, avant de les cuire dans un tanuru – le mot désignant un four à céramique en swahili. Cependant, faire chauffer un tel four avait un impact désastreux sur l’environnement local.
« Pour faire cuire les briques, les gens coupaient des arbres, explique-t-il.Ils débitaient 10, voire 20 arbres afin de faire cuire une quantité de briques suffisante à la construction de cinq habitations. »
Brûler des arbres provoque des émissions de CO2, contribuant au changement climatique, et la déforestation réduit le nombre d’arbres restants pour le combattre. À mesure que la population de la Tanzanie augmentait, la construction de logements a connu un essor significatif, ainsi que son impact néfaste sur l’environnement. « Nous avons créé un désert », déclare Madembwe.
Mais aujourd’hui, sur un plateau ensoleillé surmontant Mbeya, sous le regard vigilant de Madembwe, on pratique un type de maçonnerie d’un tout autre genre. Deux hommes portant des pelles mélangent rapidement de la terre préalablement tamisée avec du sable et du ciment. Ils y ajoutent de l’eau, puis la mixture est engouffrée par pelletées dans une petite machine en acier. Un troisième individu referme ensuite le lourd couvercle métallique et tire avec fermeté sur un grand levier vert. Enfin, une brique grise parfaitement rectangulaire apparaît lorsqu’il le relâche.
Les organisations non-gouvernementales, les gouvernements et les coopératives locales effectuent depuis des années des essais à petite échelle avec les blocs de terre compressée stabilisée (BTCS), une solution écologique aux briques cuites dont la production impose une grande consommation de bois. Les BTCS pourraient être bientôt propulsées à l’international, en partie grâce à l’aide inattendue d’une entreprise importante : le leader mondial des cimentiers.
Le géant franco-suisse LafargeHolcim mise sur l’un de ses produits, appelé DuraBric, pour promouvoir davantage la construction de logements abordables. Depuis 2013, l’entreprise a distribué près d’une douzaine de machines à presser manuelles pour la fabrication des blocs aux alentours de la ville poussiéreuse de Mbeya, en Tanzanie, ainsi qu’au Rwanda, au Cameroun et en Zambie. La fabrication de chacune de ces machines représente un coût d’environ 2 000 $ US (soit un peu plus de 1 800 euros), mais l’entreprise les prête gratuitement, à condition que les maçons utilisent le ciment de LafargeHolcim.
Expérimenter un échec commercial
Pour François Perrot, responsable du programme mondial de création de logements durables de la société, le processus de fabrication de DuraBric a commencé avec une expérience qui ne s’est pas déroulée comme prévu. Il y a quelques années, en effet, LafargeHolcim introduisit en Inde un type de plâtre à coût réduit, visant à améliorer la résistance des maisons en torchis. Le produit fut un échec commercial : les individus préféraient bâtir de nouvelles maisons en brique plutôt que de renforcer les anciennes avec du plâtre. Les chercheurs du centre de recherche et développement de Lafarge-Holcim, à Lyon, se mirent donc à expérimenter afin de trouver un moyen efficace de mélanger le ciment et la terre pour fabriquer des briques.
Au même moment, à un continent d’écart, une délégation gouvernementale à la recherche d’une alternative écologique aux briques cuites, cause de déforestation, approcha LafargeHolcim au Malawi. LafargeHolcim avait tout à coup trouvé un marché pour sa recette de terre-ciment. L’entreprise fournit donc rapidement un prototype de sa machine à presser les briques, qui servit ensuite à la construction d’une école financée par une ONG dans la capitale du Malawi.
Les briques de terre stabilisée, lorsqu’elles sont bien faites, sont plus solides et résistantes aux intempéries que celles en terre cuite. Des études ont démontré que l’utilisation de blocs de terre stabilisée pour la construction d’une maison ou d’une école peut conduire à une réduction de 20 à 30 % du coût total du projet. De plus, étant donné la structure parfaitement uniforme de ces briques, les maçons sont amenés à utiliser une quantité moindre de mortier pour combler les fissures et décident souvent de ne pas recouvrir la façade de plâtre. Ce processus réduit la quantité de ciment utilisée, dont la fabrication représente environ 5 % des émissions mondiales de CO2.
LafargeHolcim développe actuellement une machine à presser des briques emboîtables, réduisant encore davantage l’utilisation du mortier.
Un employé de LafargeHolcim montre comment utiliser les machines à presser manuelles pour la fabriquer des briques, sur un chantier de construction près de Mbeya, en Tanzanie.
S’appuyant sur des recherches effectuées par une ONG spécialisée dans la fabrication de briques en Inde, l’entreprise affirme que les blocs DuraBric émettent 13 fois moins de CO2 que les briques en terre cuite. De plus, elle estime que les BTCS émettent 20-25 % de la quantité de CO2 dégagée par leur équivalent en béton. « Il s’agit de créer quelque chose d’abordable et de durable », déclare M. Perrot. La réduction des coûts est un point fort pour les constructeurs locaux, et, selon lui, les avantages environnementaux plaisent aux ONG. Dans le même temps, l’équipe de M. Perrot s’efforce de convaincre les élus locaux de promouvoir l’utilisation des blocs DuraBric pour la construction de bâtiments publics.
Des avantages environnementaux
Malgré tout, les difficultés existent. Il s’agit, par exemple, de convaincre les maçons qui ont depuis toujours bâti des maisons à l’aide de briques en terre cuite et de leur apprendre à utiliser la machine avec précision : si les proportions de terre, de sable et de ciment ne sont pas respectées, la brique produite peut s’avérer moins solide. Lors de notre visite de sites DuraBric autour de Mbeya, nous avons vu des piles de briques laissées à sécher au soleil, alors qu’elles auraient dû être protégées par une bâche, étape cruciale garantissant la rétention d’humidité dans la brique et une solidification adéquate de cette dernière. Lâchez l’une de ces briques séchées au soleil à hauteur de la ceinture, celle-ci se désintégrera dans un nuage de poussière au contact du sol.Des études ont démontré que l’utilisation de blocs de terre stabilisée pour la construction d’une maison ou d’une école peut conduire à une réduction de 20 à 30 % du coût total du projet. Si la structure d’un toit ou les fondations sont bancales, les meilleures briques n’y survivront pas. « Une brique est composée à 90 % de terre et peut s’éroder. C’est pourquoi il est primordial d’avoir un toit solide et un surplomb pour éviter qu’il ne pleuve directement sur les murs », explique Théophile Balay, chef de projet chez LafargeHolcim qui mène chaque semaine une inspection des machines afin d’apporter son aide aux maçons.
DuraBric ne convient pas à tout le monde. M. Perrot explique que dans certains pays, comme le
Maroc, les gens préfèrent les blocs de béton aux blocs de terre. Cela étant dit, les avantages environnementaux de cette méthode ont été reconnus ailleurs en Afrique. En effet, ce type de brique a tant gagné en popularité que LafargeHolcim a démarré la construction d’une usine dans la ville de Lilongwe, la capitale du Malawi, dans le but de lancer leur production en masse : près de 10 000 briques par jour, assez pour construire deux maisons.
Un maçon sort une DuraBric fraîchement pressée, sur un chantier de construction près de Mbeya, en Tanzanie.
Source Les Affaires par Jacob Kushner, Sparknews
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