Pages

05/08/2015

MONIER : L’Opéra de Toulon, un chantier dans les hauteurs

La Communauté d’agglomération Toulon Provence Méditerranée et le Conseil départemental du Var financent la rénovation de la toiture de l’Opéra de Toulon. Au programme : aménagement des combles, performance thermique, acoustique et confort d’été.
Il pleuvait sur les décors de l’Opéra de Toulon. La toiture du bâtiment, inauguré en 1862 et conçu par l’architecte Léon Feuchère selon la volonté de Napoléon III, donnait de sérieux signes de faiblesse. Les équipes de l’Opéra et la communauté d’agglomération ont élaboré une feuille de route pour une rénovation qui reponde aux besoins du lieu : étanchéité de la couverture, mais aussi économies d’énergie, confort d’été dans cette région très chaude, acoustique incontournable pour un lieu dédié à la musique et enfin création dans le grand comble d’une salle de répétition. « Au 19e siècle, explique le directeur de l’Opéra Claude-Henri Bonnet, on répétait uniquement avant le démarrage de la saison qu avait lieu autour du mois d’octobre. Une tradition qui perdure à la Scala de Milan, où la saison démarre le 7 décembre. » Mais les temps ont changé, et la vie d’un opéra moderne nécessite une salle de répétition accessible tout au long de l’année pour l’orchestre, le ballet et les choeurs.
Le maître d’ouvrage mandate le cabinet marseillais Leccia & Cazorla pour concevoir le projet. Avec l’aide du bureau d’étude Unanime Architectes, la première étape consiste à analyser la structure. Elle s’avère en bon état, mais limite en termes de charges. Sur la charpente Eiffel, impossible d’augmenter la charge de plus de 20 kg au m². Quant au plancher haut, il ne résistera pas à plus de 200 kg / m².
Un traitement par sarking
Soucieux de laisser apparente la charpente métallique, ouvrage remarquable, l’architecte s’intéresse au sarking, un procédé d’isolation thermique par l’extérieur. Mais les limites de charges restreignent son choix. Il se tourne vers la solution de Monier, le Clima Comfort, qui tout en offrant une résistance thermique conforme à la réglementation thermique (R de 6,36 m².K/W) n’ajoute que 5 kg / m². Monier remporte aussi la partie pour la fourniture des tuiles, modèle Marseille, une spécificité régionale (voir encadré).
L’architecte des bâtiments de France Jacques Guérin, maillon essentiel pour ce bâtiment classé depuis 1988, l’un des rares dans la ville de Toulon, valide l’ensemble du système qui comporte, depuis la sous-face jusqu’à la couverture, une plaque de plâtre, une isolation thermoacoustique de 5 cm en laine de verre, un vide d’air de 5 cm, un écran pare-vapeur Paracoustic, un sarking en polyuréthanne, des contrelattes 6 x 4 disposées tous les 60 cm sur le sarking, des liteaux 27 x 40 et enfin les tuiles. L’absence de débord de toit facilite la ventilation en faîtage à l’aide d’un closoir Figaroll. Cette dimension joue un rôle-clé dans la pérennité de l’ouvrage, car elle facilite l’évacuation de la vapeur d’eau accumulée sous les tuiles, qui risquerait de les endommager en cas de gel. L’ensemble du lot couverture est confié à une entreprise de couverture spécialisée dans le bâti ancien, la SAS Alain Le Ny, établie à Dardilly. Monier a accompagné les équipes pour la mise en oeuvre du sarking, un procédé inhabituel sur les monuments historiques.
Accès
Autre dimension-clé, l’accès au chantier. Pour l’approvisionnement en matériaux, l’agence Point P de Toulon a dû mettre en place des livraisons de petites quantités tous les deux jours, car il est impossible de stocker sur site. Quant à l’accès à la toiture, une société spécialisée a déployé un échafaudage parapluie. Couvert d’une fine bâche, il permet aux équipes de travailler même par fortes chaleurs : l’air circule en toiture. Les matériaux sont acheminés jusqu’en haut non par grue mais par monte-charge. Par la toiture, dans une ouverture temporaire créée dans l’échafaudage et dans la charpente, ont transité les gros blocs de ventilation, qui alimentent tout le bâtiment.
Focus: La tuile de Marseille, une longue histoire
Au milieu du XIXe siècle, se développe la tuile de Marseille. Ce produit à grand moule, assemblé par emboîtement, est fabriqué par de nombreuses tuileries de la région. C’est Guichard Carvin & Cie qui fournit les tuiles de l’Opéra de Toulon en 1861, comme en atteste l’abeille moulée au revers de la tuile. Chaque industriel signe alors avec un logo spécifique sa production. La tuile Marseille parcourt le monde, les transporteurs l’utilisant pour lester les bateaux. On la retrouve sur tout le bassin méditerranéen, mais aussi à Saïgon, en Afrique noire, en Amérique du Sud. Le déclin de la marine à voile, lorsque se développe le bateau à vapeur, nuit à la tuile Marseille. Les tuileries se regroupent. Au fur et à mesure des acquisitions, la tuilerie Guichard Carvin & Cie rejoint Lafarge Couverture, devenu depuis Monier. Les nouvelles tuiles qui couvriront l’opéra de Toulon porteront elles aussi l’abeille en signature, qui a traversé les époques.
Source Le Moniteur par Pierre Pichère

Aucun commentaire: