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09/02/2010

Taxe carbone : les options soumises aux entreprises

Le gouvernement s'apprête à publier un document de concertation sur la taxe carbone, préalable à la négociation avec les entreprises, en particulier industrielles. Est notamment proposé un barème fonction de la valeur ajoutée.
La concertation sur la taxe carbone doit s'ouvrir la semaine prochaine, mais les options proposées aux entreprises sont déjà balisées. Le document de concertation, rédigé suite à la censure du Conseil constitutionnel, doit être publié dans les tout prochains jours, dans un format assez réduit (28 pages). Le gouvernement ne peut plus faire la distinction entre les industries les plus polluantes -les 1.018 sites soumis aux quotas européens de CO2 -et les autres. Mais un traitement particulier -un barème fonction de la valeur ajoutée -peut être proposé aux secteurs soumis à la concurrence internationale et sous forte contrainte énergétique. Des taxes différenciées vont être proposées à certains secteurs sensibles.

· Secteur aérien
Le document, encore provisoire, propose d'appliquer la taxe carbone (17 euros la tonne de CO2) à « l'ensemble des émissions entre deux aérodromes français, indépendamment de la nationalité des opérateurs », soit 33 millions d'euros attendus. Les vols internationaux seraient exonérés, comme le veut la Commission européenne, ainsi que ceux vers l'outre-mer. « L'application de la contribution carbone pourrait être compensée par une baisse à due concurrence des charges pesant sur le secteur » (taxe d'aviation civile, etc.). Elle serait globalement neutre pour le secteur, mais pas pour toutes les compagnies.

· Production thermique d'électricité
C'est le premier secteur qui sera totalement soumis aux quotas de CO2 payants au niveau européen, à compter de 2013. L'idée est donc de trouver une solution provisoire pour répondre aux critiques du Conseil constitutionnel. Le document évoque ainsi une « taxation dans la limite des allocations gratuites de quotas ». Une entreprise qui achète 100 quotas gratuits, complétés par 50 quotas payants, ne serait donc taxée que sur les 100 quotas gratuits. Le gouvernement défend aussi longuement le principe d'une taxation partielle (vraisemblablement de 20 %, soit 3,10 euros la tonne) : la taxe carbone pourrait en effet avoir « un effet "distortif" sur le marché pouvant se traduire par une hausse des émissions de CO2 », indique-t-il. En effet, le fait de taxer la production d'énergie thermique en France (production au gaz) pourrait inciter les entreprises à se fournir ailleurs, en Allemagne par exemple (production au charbon), à l'opposé de l'objectif recherché.

· Chauffage urbain
C'est l'un des dossiers les plus complexes, du fait de la diversité des clients (agriculteurs, industrie, etc.). Le rapport, très parcellaire sur ce point, évoque une taxation à hauteur de 17 euros la tonne de CO2, mais avec une compensation par le Fonds chaleur de l'Ademe, pour inciter les entreprises à développer des énergies renouvelables.

· Autres secteurs
Jean-Louis Borloo défend une taxe dégressive, en fonction de la valeur ajoutée. La taxe serait de 10 %, au-delà de 0,6 % de la valeur ajoutée, de 20 % au-delà de 0,2 %, et de 100 % en deçà. L'impact serait fort : la contribution carbone représenterait de 0,5 % de la VA (pour le papier-carton) à 1,9 % de la VA (pour les tuiles et briques). Bercy plaide pour une solution moins douloureuse : la taxe serait de 20 %, plafonnée à 0,5 % de la valeur ajoutée. Mais ces chiffres ne figureraient pas dans le Livre blanc pour laisser de la place à la concertation. Christine Lagarde plaide aussi pour l'instauration d'un crédit d'impôt sur les sociétés qui s'appliquerait à l'ensemble des entreprises (et non uniquement à l'industrie) en fonction notamment des « investissements environnementaux permettant d'aller au-delà des normes européennes ».

· Bonus-malus
Jean-Louis Borloo propose en outre que les entreprises disposent d'une compensation forfaitaire, en fonction de leur comportement par rapport à la moyenne du secteur. Les entreprises qui agissent mieux que leurs concurrents seraient gagnantes. Mais le rapport pointe le risque d'une censure de Bruxelles, qui prohibe les aides sectorielles. Jean-Louis Borloo a rédigé une « annexe d'étude du système anglais », où existe déjà un bonus-malus similaire.

Le marché des quotas
Le gouvernement avait prévu d'exonérer de taxe carbone les 1.018 sites industriels soumis au marché européen des quotas (sidérurgie, chaux, ciment, tuiles et briques, etc.), considérés parmi les plus polluants. Ceux-ci produisent 93 % des émissions de CO2 industrielles. Mais le Conseil constitutionnel a contesté ce principe : en effet, ces quotas sont actuellement gratuits en deçà d'un certain seuil, et ne seront totalement payants qu'à compter de 2027.
Source Les Echos par LUCIE ROBEQUAIN

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