Suite à la censure du Conseil constitutionnel, le gouvernement cherche les moyens de soumettre partiellement les groupes industriels à la taxe carbone. Les exonérations prévues pour les professions exposées (routiers, etc.) ne seront pas modifiées. Pas plus que le barème pour les particuliers.
Le gouvernement a beau marteler qu'il ne renoncera pas à la taxe carbone, il n'a pas encore trouvé la réponse à la crise provoquée, mardi soir, par la censure du Conseil constitutionnel. Lui qui s'apprêtait à envoyer les premiers chèques de remboursement aux ménages, la semaine prochaine, se donne trois semaines pour présenter une nouvelle copie : celle-ci sera intégrée au collectif budgétaire sur le grand emprunt, présenté le 20 janvier en Conseil des ministres.
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Dans les faits, le Conseil constitutionnel ne remet pas en cause les grandes lignes du dispositif, insiste l'exécutif, et notamment le principe d'un prélèvement sur les ménages et les entreprises (17 euros par tonne de CO2 émise). « Nicolas Sarkozy reste très déterminé à imposer la taxe carbone. C'est une priorité absolue, même si c'est difficile et même si on est à trois mois d'une échéance électorale », a souligné hier la secrétaire d'Etat à l'Ecologie, Chantal Jouanno.
Mais la loi fait l'objet de trop d'exonérations pour respecter le principe d'égalité devant l'impôt et l'objectif de lutte contre le réchauffement climatique, ont estimé les sages. Une réunion a eu lieu à Matignon, hier, pour évaluer les conséquences de cette décision. Il en ressort que les exonérations prévues pour les professions exposées (75 % pour les pêcheurs et les agriculteurs, 35 % pour les transports routiers, fluviaux et maritimes) ne sont absolument pas remises en cause. Au contraire, elles se justifient « par la poursuite d'un intérêt général, telle que la sauvegarde de la compétitivité de secteurs économiques exposés à la concurrence internationale », indique le Conseil dans ses commentaires. Elles ne seront donc pas modifiées.
Des systèmes de compensation
En revanche, la situation est différente pour les 1.018 entreprises les plus polluantes (sidérurgie, chaux, ciment, tuile et brique, verre) qui produisent 93 % des émissions de CO2 industrielles mais qui, parce qu'elles sont soumises au marché européen des quotas, sont exonérées totalement de la taxe carbone. Or, ces quotas sont actuellement gratuits, en dessous d'un certain seuil, et ne seront totalement payants qu'à compter de 2027, explique le Conseil. Il faudrait donc soumettre ces entreprises, non seulement aux quotas européens, mais aussi à la taxe carbone, ce qui représenterait 2,5 milliards d'euros de charges supplémentaires au taux actuel. « Cela est suicidaire ! Cela pose un gros problème de compétitivité et d'emploi », estime Gilles Carrez, rapporteur UMP du budget à l'Assemblée. « Le Conseil est plus à l'aise avec des concepts bicentenaires qu'avec la réalité économique des entreprises », renchérit son homologue du Sénat, Philippe Marini.
Le gouvernement partage le même point de vue, mais il ne peut guère faire fi de la censure constitutionnelle. Sauf à s'exposer à un nouveau désaveu. Il cherche donc « comment combiner le marché des quotas et la taxe carbone, sans imposer de double peine aux entreprises ». La première solution serait de leur appliquer des tarifs réduits de taxe carbone. La deuxième serait de mettre en place des systèmes de compensation, comme c'est le cas en Suède. « La dimension écologique de la loi impose que tout le monde paie la taxe carbone. Mais le Conseil constitutionnel ne peut pas interdire des restitutions en fonction d'autres critères, comme la valeur ajoutée », explique Michel Taly, président de la commission fiscale de l'Institut de l'entreprise.
Convaincre la majorité
Au-delà des problèmes techniques, qui n'apparaissent pas insurmontables, le gouvernement doit également convaincre la majorité de débattre une nouvelle fois du sujet en urgence, avant les régionales. Le président de l'Assemblée, Bernard Accoyer, le président du groupe UMP, Jean-François Copé, ou encore le secrétaire général de l'UMP, Xavier Bertrand, sont montés au créneau hier pour soutenir l'exécutif. Mais certains parlementaires ne sont guère enthousiastes : « Compte tenu du peu d'empressement de nos partenaires internationaux, je préférerais reporter la mesure au 1er janvier 2011 », estime Philippe Marini, tandis que le député Hervé Mariton appelle le gouvernement à ne pas « brusquer » la majorité (lire page 3). Car même si Matignon va chercher à cantonner le débat aux seuls griefs du Conseil constitutionnel - il n'est pas question, en particulier, de modifier le barème ni les compensations prévues pour les particuliers - nom-bre de syndicats (CGT, CFDT, FO), d'associations (environnementales, de consommateurs) et de partis sont déjà montés au créneau pour exiger une remise à plat complète du dispositif.
Source les Echos
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