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05/04/2022

Jean-Baptiste Fayet, Terreal : "Des hausses de prix pour privilégier l'activité"

Le DG France de Terreal Jean-Baptiste Fayet revient sur les décisions récentes du groupe spécialiste de la terre cuite en termes de prix et de lignes de production.

Comment la crise énergétique atteint-elle votre activité ?

Nous sommes fortement touchés par le choc énergétique. Depuis quelques années, nous fonctionnions avec un cours du gaz entre 15 et 20 €, et des variations de prix de quelques euros sur une journée. La hausse a démarré avant la guerre en Ukraine au 2e trimestre 2021, et s'est fortement accentuée depuis janvier. Le record a été atteint en mars, à 340 €, avec des variations journalières pouvant atteindre 100 € ! Les cours ont rebaissé depuis, mais restent entre 100 et 120 €, soit entre 5 et 6 fois leur cours avant crise.  Et le prix de l'électricité s'est lui aussi envolé. Nos coûts de production s'envolent, et certaines de nos lignes se retrouvent très fragilisées, ce qui a nécessité des décisions rapides.

Qu'avez-vous décidé ?

En mars, nous avons choisi d'arrêter trois fours, sur les 25 que compte Terreal. Cette décision touche moins de 10 % de la production du groupe. Elle concerne l'une des quatre lignes de l'usine de Roumazières (Charente), une ligne à Castelnaudary (Aude) et une ligne de production d'accessoires autour de la brique à Colomiers (Haute-Garonne).

Pour combien de temps ces lignes sont-elles arrêtées ?

Nous avons choisi de privilégier l'activité, en appliquant des hausses de prix qui nous permettront de redémarrer les lignes arrêtées dès le mois d'avril. Il faut savoir qu'en 2021, nous avions absorbé les hausses de coût sans les répercuter dans nos prix. Nous avions appliqué une première augmentation générale de 15 % en janvier, nous en appliquerons une deuxième en avril. Et les produits issus des trois lignes arrêtées se verront appliquer une hausse complémentaire spécifique.

Les prix pourront-ils redescendre ?

Bien sûr, quand le prix du gaz reviendra à une situation plus normale, nous ajusterons nos prix à cette nouvelle configuration.

Outre la question des prix, se pose le problème de l'approvisionnement...

Le marché a crû de 15 % l'an dernier, et la filière terre cuite a collectivement répondu en vidant ses stocks pour honorer la demande. Pour l'heure, Terreal sert ses clients au même niveau que l'an dernier, mais la demande ne cesse de monter. Nous fonctionnons donc avec un système de gestion de quotas, que chaque délégué commercial alloue sur le terrain.

Craignez-vous que les hausses de prix, dans la terre cuite comme dans de nombreux autres domaines, affectent la santé financière des entreprises de travaux ?

Nous commençons en effet à le redouter. En rénovation, les clients répercutent plutôt bien les hausses, d'autant que nous essayons de leur donner du temps pour le faire. Les matériaux pèsent autour de 30% du devis final, et la demande est bonne.

Sur le neuf en revanche, face à la hausse généralisée et aux pénuries d’acier qui se profilent, l'activité risque de ralentir, et certains chantiers pourraient s'arrêter.

Redoutez-vous un effet sur la demande, côté maîtres d'ouvrage ?

Une partie de la demande risque d'être freinée, mais les carnets de commandes sont particulièrement remplis. La rénovation de toiture est souvent contrainte, du fait d'une couverture endommagée. Même si le devis du couvreur grimpe significativement, ces travaux devraient quand même avoir lieu ! Le coup d'arrêt pourrait être plus brutal dans le neuf.

Côté prescription, redoutez-vous que les projets se détournent de la brique au profit du béton ?

Le béton n'est pas exempt de hausses, même si elles sont moins spectaculaires que dans la terre cuite. Et nous sommes portés par la RE 2020, qui nous est plutôt favorable, d'autant que le bois souffre de difficultés plus grandes encore que celles de la brique !

Attendez-vous des mesures spécifiques des pouvoirs publics ?

Le Premier ministre a déjà annoncé de premières mesures dans le Plan de résilience, sur les révisions de prix de marché, mais aussi sur le soutien aux entreprises fortement consommatrices d'énergie. Mais pour ce dernier volet, nous ne sommes pas concernés, car ne sont ciblées que les entreprises avec des pertes d'exploitation, ce qui n'est pas le cas de Terreal. Toute mesure qui nous donnerait de la visibilité sur les prix du gaz et de l'électricité dans les prochains mois serait utile !

Source Le Moniteur par Pierre Pichère