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12/04/2022

« Pour la filière terre cuite, la crise de l’énergie est une déflagration énorme », Isabelle Dorgeret (FFTB)

Les fabricants de matériaux en terre cuite se trouvent directement impactés par la flambée du prix du gaz. La directrice générale de la Fédération française des tuiles et briques (FFTB) revient sur l'impact de la hausse des prix de l'énergie depuis un an.

Quelle a été la situation de la filière terre cuite en 2021 ?

Le prix de l’énergie avait déjà connu une hausse importante l’année dernière. Un mégawattheure (MWh) de gaz coûtait en moyenne 97 € au quatrième trimestre contre 18,40 € au premier trimestre. Pour l’électricité, les tarifs sont passés de 50 à 156 €. En parallèle, la demande des produits en terre cuite a été particulièrement soutenue et la production a dépassé ce qui était anticipé. Par conséquent, nos industriels, qui achètent leur gaz en amont, l’ont consommé plus vite que prévu et ont été contraints de payer leur supplément au « prix spot » (prix payé pour une livraison au comptant, NDLR), bien plus élevé. Pour autant, nos tarifs n’ont pas augmenté plus que d’habitude car notre filière avait absorbé ces augmentations en espérant que la situation se rétablirait ultérieurement.

Que représente l’énergie dans le coût d’une tuile ?

L’énergie utilisée pour la fabrication d’une tuile est à 87% du gaz. Lorsque l’on retire les taxes, les transports… l’énergie représentait 8% du prix d’une tuile au premier trimestre. Mais, au quatrième trimestre, cette proportion atteignait 60%. Pour nous, c’est une déflagration énorme.

Et en 2022 ?

C’est encore pire. Nous subissons des pics de prix qui dépassent ceux de l’an passé. Alors que le record 2021, atteint le 21 décembre, s’établissait à 180  € le MWh de gaz, son prix a atteint 227 € le 7 mars dernier.

Comment les industriels réagissent-ils ?

Tout dépend, bien entendu, de la manière dont ils ont anticipé leurs achats d’énergie. Cependant, les prix sont nécessairement bien plus hauts que par le passé. Les plus petits reçoivent même des lettres recommandées de leurs fournisseurs d'énergie dans lesquelles ces derniers dénoncent les contrats de manière unilatérale, laissant l’industriel confronté aux prix actuels. Bien sûr, l’industriel va partir au contentieux, mais cela reste très violent.

Quel est  le niveau de la demande actuelle ?

Elle reste très forte et nos fabricants font tout pour l’honorer. Ils l’ont fait en 2021 au prix de baisses de marge. Ils le font encore cette année, même si la situation est plus complexe et que certains vont être contraints d’arrêter des lignes. On navigue à vue dans un océan déchainé : combien de temps va durer la guerre ? Un embargo sur le gaz russe sera-t-il décidé ? Nos craintes concernent aussi nos clients, couvreurs et maçons, qui se trouvent confrontés à des hausses de prix des produits qu'ils sont dans l'incapacité de répercuter auprès des maîtres d'ouvrage. Nous craignons un blocage de la filière. Cependant, contrairement au secteur du carrelage par exemple, nous avons la chance d’avoir des matières premières locales  – les argiles rouges- qui appartiennent aux fabricants.

Comment réduire votre dépendance d’énergie provenant de l’étranger ?

La filière n’a heureusement pas attendu la crise énergétique pour se pencher sur la question. La FFTB  et le Centre technique de matériaux naturels de construction (CTMNC) travaillent depuis 2017 sur une feuille de route de la décarbonation de notre industrie. Cette feuille de route, qui devrait être publiée par le Conseil national de l’industrie dans les semaines qui viennent, engage la filière terre cuite française à baisser de 27% ses émissions de CO2 à horizon 2030 par rapport à 2015 et de 80% à horizon en 2050. Cet engagement est porté par l’ensemble des acteurs de la filière qui ont d’ores et déjà lancé les investissements nécessaires à l’échéance de 2030.

Source Le Moniteur par Fabien Renou