Les ventes de terrains à bâtir sont en chute libre. En Belgique, c'est -10% depuis le début de l’année par rapport à l’an dernier, selon le dernier baromètre des notaires. En Wallonie, la tendance est encore plus marquée, avec un repli des ventes de 20% depuis janvier. L’ampleur a de quoi étonner, mais il y a une certaine logique: les terrains disponibles – constructibles – sont de plus en plus rares, et donc de plus en plus chers.
La vente de terrain chute de 20,5% en Wallonie
Les prix des matériaux de construction ont, eux aussi, fameusement augmenté ces dernières années. Au point que l’achat d’un terrain et la construction d’une maison neuve forment désormais une perspective budgétairement inatteignable pour de plus en plus de monde. Cela ne signifie pas pour autant un coup d’arrêt à la construction de logements neufs – pression démographique oblige. Ce qui change, c’est ce qui va être construit, où et par qui.
2050
La Wallonie a décidé de s’appliquer un Stop Béton à l'horizon 2050, la Flandre a déjà adopté le sien.
La Belgique a une tradition historique d’auto-construction: des privés qui font appel à un architecte et une entreprise de construction pour se faire bâtir une maison. C’est ce modèle belge de "la brique dans le ventre", qui reposait sur la disponibilité de nombreux terrains constructibles, qui est en train d’évoluer.
D’abord, parce que pour limiter l’étalement urbain et l’artificialisation des sols (se protéger des inondations et des sécheresses, entre autres), la Wallonie a décidé de s’appliquer un Stop Béton à l'horizon 2050, la Flandre a déjà adopté le sien. Pour faire court, il sera moins facile de construire tout et n’importe quoi, partout, et n’importe où.
Promoteurs en première ligne
Ensuite, parce qu’à mesure que l’offre en terrains diminue, les surfaces qui restent deviennent de plus en plus complexes à bâtir: en termes d’accès, d’infrastructures, de voisinage et donc de permis. Qui a les reins assez solides pour assurer ce genre de projets? Les promoteurs immobiliers.
Bien plus que digérer sa brique dans le ventre, le Belge va devoir apprendre vite à faire mieux avec ce dont il dispose déjà.
Un rapide coup d’œil à l’évolution des portfolios de grands promoteurs de type Matexi ou Thomas&Piron sur les vingt dernières années suffit à dresser le constat: ils ont compris. À quelques exceptions près, les grands projets immobiliers qu’ils développent sont aujourd’hui des immeubles à appartements, situés en centres urbains ou péri-urbains. Un rééquilibrage est à l’œuvre. Des complexes d’appartements construits par des promoteurs immobiliers proches de centres de vie (et donc de services) prennent le dessus sur la maison individuelle commanditée par les particuliers en rase campagne.
Faire mieux avec ce qui existe
Reste que, pour disposer de plus de logements, la priorité est de rénover le bâti existant. Le chantier est titanesque tant le parc de logements belge est globalement en mauvais état. Normes énergétiques, confort acoustique, gestion de l’eau, ventilation… le clivage entre les logements existants et les constructions neuves se fait d'ailleurs de plus en plus marqué. Or, ni les incitants, comme les primes à la rénovation, ni les contraintes, telles que les taxes d’inoccupations, ou des obligations d’amélioration énergétiques, ne suffisent.
Certaines rues, des quartiers entiers parfois, dans lesquels la valeur marchande des biens est trop faible par rapport au coût d’une rénovation, continuent à se détériorer par immobilisme. Il faudra parfois en passer par de la démolition-reconstruction (sujet encore tabou, politiquement). Mais dans tous les cas, il faut y aller plus vite et plus fort, si l’on veut limiter à la fois la bétonnisation des sols et développer l’accès à un logement de qualité pour tous. Bien plus que digérer sa brique dans le ventre, le Belge va devoir apprendre vite à faire mieux avec ce dont il dispose déjà.