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11/12/2022

Comment les fabricants français de briques et de tuiles comptent diminuer leur empreinte carbone

Pour réduire leurs émissions de CO2 (-27% entre 2015 et 2030, et -80% à horizon 2050), les fabricants français de tuiles et de briques, actuellement confrontés à la forte hausse des prix du gaz, annoncent travailler sur la modification de leur process et de leurs approvisionnements en énergie.

Dans un contexte de flambée des prix de l’énergie, la Fédération française des tuiles et briques (FFTB, 72 entreprises, 125 lignes de fabrication en France, 4500 emplois directs, 953 millions d’euros de chiffre d’affaires et 4,5 millions de tonnes de tuiles et de briques livrées en 2021) accélère sa transition énergétique. Par rapport à 2015, les objectifs affichés sont une baisse de 27% des émissions de CO2 en 2030, et de 80% en 2050, avec 32 kg émis par tonne de matériaux produite contre 158 il y a sept ans. De quoi espérer soulager, à long terme, la facture induite par les soubresauts des prix du gaz. «Les tarifs de tout ce qui a besoin de chaleur (tuiles, isolation, polystyrène) explosent totalement », observe Charles-Gael Chaloyard, directeur général des négoces Tout Faire.

« Nous sommes dans un procédé qui recourt à 80% au gaz naturel dans sa consommation, principalement dans la cuisson. En un an et demi, les prix du gaz ont été multipliés par cinq. Avec les prix actuels du gaz, cela devient vital pour nous d’accélérer », souligne Isabelle Dorgeret, la directrice générale de la FFTB. Dans le process de fabrication des tuiles et des briques, la combustion d’énergie représente 76% des émissions de CO2, selon les chiffres fournis par les fabricants, et la décarbonatation des argiles calcaires 24%.

Premier volet de la feuille de route de décarbonation, la diminution des besoins en énergie, l’amélioration des rendements et la valorisation des pertes thermiques. 20% de gains sont attendus, à terme, sur les émissions de CO2. Des biocombustibles et des boues papetières pourraient être incorporées durant la cuisson. La charge des fours pourrait être optimisée. «On peut essayer d’utiliser moins d’eau pour le façonnage des produits, moyennant quoi il y aura moins besoin d’énergie pour le séchage. Les échangeurs thermiques permettent, eux, de récupérer des calories fatales et de les réutiliser», ajoute Isabelle Dorgeret. Récemment, Terreal a équipé son deuxième site de Chagny (Saône-et-Loire) d’un échangeur nouvelle génération, pour mieux récupérer la chaleur fatale du four et en réutiliser l'énergie pour le broyage de l’argile.

Des fours à hydrogène envisagés

Deuxième levier de cette trajectoire «bas carbone», la modification du mix énergétique (40% de gains espérés). Certains sites de production utilisent déjà jusqu'à 45% d'énergies de substitution (biomasse, méthane issu de déchets ménagers…) «Chez Bouyer Leroux, le gaz naturel est remplacé par de la biomasse ou du syngaz. On récupère des déchets de bois, on les consume dans des installations de pyrogazéification. Le gisement devrait augmenter sous l’effet de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) des matériaux du bâtiment, en plus de la REP actuelle sur le mobilier», explique la directrice générale de la FFTB. Le recours à des pompes à chaleur haute température fait partie, quant à lui, des technologies en phase pilote.

Encore en R&D, le recours à l’hydrogène est sur la table, tout comme la possibilité d’électrifier les fours. La fédération compte s’appuyer sur les travaux de l’association spécialisée France Hydrogène. «Il faudra modifier les installations, et vérifier les caractéristiques techniques des produits à l’hydrogène. Techniquement, il n’y a pas d’obstacles technologiques à cuire des produits terre cuite à l’électricité, mais les investissements sont colossaux. Actuellement, les coûts des fours n’ont pas de sens par rapport aux prix des produits terre cuite», estime Isabelle Dorgeret, qui rappelle que le carrelage (matériau dont la production utilise de l’électricité) est vendu plus cher à la tonne.

Du CO2 capté à la source

Troisième pan de cette stratégie : la captation du CO2 dans les fumées (20% de gains attendus). Deux options sont sur la table : capturer le CO2 dans les fumées et le stocker, ou capturer le CO2 dans les fumées de four, le transformer en énergie et le réutiliser dans le process. «Il faut absorber le CO2 pour ne qu’il soit pas rejeté dans l’atmosphère, et le capter au plus près du four. Ce ne sera pas dans un futur très proche», précise, à la FFTB, Isabelle Dorgeret. Le Centre technique de matériaux naturels de construction travaille sur le projet, nommé Recycarb, dans la lignée de Fastcarb, destiné à la carbonatation accélérée de granulats de béton recyclé. L’industriel nantais Leroux & Lotz est aussi dans la boucle.

Malgré l’impact carbone des usines, leur proximité avec les chantiers demeure, elle, un point positif pour la filière, estime-t-on dans le secteur. En matière de livraison des produits finis, une brique parcourt environ 200 kilomètres, et une tuile environ 400 km.

Source L'Usine Nouvelle par Franck Stassi