L’atterrissage des tendances se poursuit donc dans les matériaux de construction et, sur les huit premiers mois de l’année, les niveaux d’activité restent désormais voisins de ceux constatés sur la même période de 2019 (- 0,2 % pour les granulats et – 1,2 % pour le BPE, données CVS-CJO). Cette “normalisation” des tendances, en partie liée à l’atténuation des effets de base, est commune à bon nombre de matériaux et s’accompagne d’un contexte conjoncturel qui demeure porteur.
Côté Bâtiment, les carnets de commandes dans le gros œuvre affichent toujours des niveaux très élevés (9,5 mois) même si les contraintes d’approvisionnement pèsent sur le bon déroulement des chantiers. La confiance des professionnels du secteur reste de mise en ce début d’automne, y compris dans TP, bien que le niveau des prises de commandes soit encore poussif.
Mais les carnets actuels devraient encore alimenter l’activité de la fin 2021 et d’une partie de 2022.
Bâtiment : une offre contrainte
Interrogés en septembre par l’INSEE,les professionnels du bâtiment gardent confiance dans leur activité future et leurs carnets de commandes, les soldes d’opinion correspondants continuant de grimper, surplombant leur moyenne de long terme. Dans le même temps, leur opinion sur l’activité passé s’effrite un peu, et ce, bien que les capacités de production frôlent leur taux d’utilisation maximal (93,2 % contre 87,9 % en moyenne). Le maintient de tensions élevées dans le recrutement et l’approvisionnement peuvent expliquer cette érosion, plus de la moitié des entreprises du gros œuvre (55,9 %) ne pouvant produire plus,faute de personnel (pour 68 % d’entre eux) ou faute de disponibilité de certains matériaux (pour 14,5 % des entrepreneurs du bâtiment). Côté construction neuve, s’il est vrai que le segment du non-résidentiel peine à se relever du choc sanitaire (avec des mises en chantier qui, en cumul à fin août,sont encore - 12,3%sous leur niveau des huit premiersmois de 2019, et des autorisations à - 14,2 %), l’activité côté résidentiel s’est quant à elle nettementraffermie. En effet, à fin août et en cumul depuis janvier, les mises en chantier dépassaient de 3,4 % leur niveau de 2019 (+ 16,8 % au regard de 2020), un constat valable dans le collectif (+ 4,9 % comparé à 2019 et + 17 % comparé à 2020) comme dans l’individuel (+ 1,5 % et + 16,5 % respectivement). Cette dynamique pourrait perdurer dans les mois à venir, notamment dans l’individuel si l’on en croit les dernières données sur les permis. Ainsi, sur les huit mois de 2021, les autorisations de logements grimpaient de + 26,9 % sur un an (+ 4,5 % comparé à 2019), dont + 36,1 % dans l’individuel (+ 17,3 %). Dans le collectif, les difficultés structurelles qui pèsent sur l’offre (pénurie de foncier,freins locaux, procédures d’urbanisme, acceptabilité sociale en zone tendue…) freinent le rebond des projets.Ainsi, les permis, en hausse de + 19,9 % sur un an au cours des huit premiers mois de 2020 restent en dessous des niveaux de 2019 (- 4,5 %), et ce, en dépit d’un besoin pérenne en logements neufs et de conditions financières qui sont historiquement attractives. Ce constat, qui rejoint les premières conclusions du Rapport Rebsamen (1er tome remis le 22 septembre) a conduit le Premier ministre à s’engager sur des pistes de relance de la construction neuve en zone tendue.
L’annonce de la prise en charge par l’Etat de l’exonération de la taxe foncière des bailleurs sociaux pourrait inciter les maires (jusqu’ici privés de ces ressources fiscales) à délivrer plus de permis. De même le recentrage du Plan de relance sur des « contrats locaux » entre Etat et collectivités (175 millions d’euros) pourrait favoriser la construction de logements collectifs en zone tendue tandis que la mobilisation du foncier public (via le fonds friche du Plan de relance dont l’affectation sera priorisée sur la création deogements) devrait permettre la construction de 21 000 logements dès 2022 et 50 000 autres dans les années à venir selon Matignon.
Prochainement inscrites dans le PLF2022, ces mesures devraient soutenir le secteur locatif social et lever certains freins à la construction de logements dans les grandes agglomérations. Enfin, côté travaux publics, la concrétisation du Plan de relance en investissements est toujours attendue. Après le rebond du premier semestre lié à l’achèvement de chantiers en cours et/ou stockés pendant la pandémie, les carnets peinent encore à se regarnir. Pour autant, les entrepreneurs demeurent plutôt optimistes sur leur activité future.
Perspectives 2021-2022
Les tensions d’approvisionnement devraient encore peser sur l’activité en cette fin d’année, la demande restant solide dans le bâtiment et plus modérée dans les TP. En dépit d’un second semestre en repli, la production de granulats de 2021 serait 9 % supérieure à celle de 2020 mais proche de celle de 2019 (- 0,5 %, données brutes). Côté BPE, les livraisons gagneraient elles aussi + 7,5 % par rapport à 2020,mais seraient inférieures de - 1,5 % à celles de 2019. Le niveau actuel des carnets dans le gros œuvre, freiné dans leur réalisation par les difficultés d’offre, permettrait au moins de stabiliser l’activité BPE en 2022 tandis que le réveil graduel de la demande publique et privée, côté TP, ainsi que la mise en place des projets du Plan de relance, pourraient soutenir un peu plus l’activité granulats.