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29/08/2020

Côtes-d’Armor. À Langueux, dans les années 1920, cette usine de briques faisait vivre 300 ouvriers

La Briqueterie est un site dédié à l’histoire des familles de Langueux (Côtes-d’Armor). À la fermeture de l’usine de briques, en 1947, elles ont dû se reconvertir dans le maraîchage pour survivre.

Barbara Daeffler, responsable de site, et Anne Chanot, médiatrice du musée de la Briqueterie depuis 2007, devant le four Hoffmann.

L’usine de briques de Langueux (Côtes-d’Armor) est forte d’une histoire de près de 100 ans. Construite en 1864, elle a tourné à plein régime au début du XXe siècle, si bien qu’en 1925, elle produisait 10 000 tonnes de produits par an, majoritairement des briques et de la céramique. La proximité des voies ferroviaires, des routes et des ports permettait de livrer ces produits dans toute la Bretagne.

Anne Chanot, qui organise des ateliers et des visites guidées au musée de la Briqueterie depuis 2007, nous parle de cette industrie singulière des Côtes-d’Armor.

Quel contexte a favorisé l’implantation de l’usine à Langueux ?

C’est tout d’abord, la présence de marne et d’argile dans cette zone, éléments nécessaires à la fabrication de briques. À l’époque, les carrières de Langueux, de Quessoy et d’Hillion regorgeaient d’argile. La marne, elle, était très présente dans la baie de Saint-Brieuc.

Comment étaient confectionnées les briques ?

Elles étaient cuites dans un four Hoffmann à plus de 1 200 degrés qui fonctionnait en continu. Par le biais d’un habile stratagème de voies d’air, la zone de cuisson était déplacée toutes les douze heures. Grâce à ce four, les ouvriers pouvaient produire entre 10 000 et 15 000 briques par jour.

Y a-t-il un lien entre le chemin de fer, qui se développait au XXe siècle dans la région, et la production de briques ?

Au début du XXe siècle, le réseau ferroviaire du grand train qui allait de Paris à Brest ne faisait que traverser le département. Afin de favoriser les échanges de personnes et de marchandises, on a créé une petite ligne de train qui passait en bord de mer et rentrait dans l’usine. La nouvelle ligne n’a pas été créée pour l’usine mais celle-ci en a bien profité. En 1922, 5 000 tonnes de produits (briques et céramiques) ont été exportées de Langueux à Moncontour (Côtes-d’Armor) par voie ferrée.

Pendant les temps forts de l’usine, combien de familles vivaient de la brique ?

Dans le premier quart du XXe siècle, une centaine d’ouvriers travaillait dans les fourneaux de la briqueterie. Ce nombre a atteint les 300 dans les années 1920. Il y avait des gens du bourg et des gens qui vivaient sur la grève. Les hommes s’occupaient du four, tandis que les femmes s’assuraient du séchage des briques.

Quelles étaient les conditions de travail ?

Le salaire était bas. 198 € par mois pour les femmes, 500 € pour les hommes. En 1990, on a recueilli des témoignages d’anciens briquetiers. Ils parlaient d’une grande famille qui s’entraidait, mais les femmes regrettaient la misogynie, très présente au travail. Les hommes ne leur faisaient pas de cadeaux, ils regardaient même sous les jupes des sécheuses qui travaillaient au-dessus du four. Les conditions de travail étaient tellement pénibles pour elles qu’elles avaient finies par baptiser cette usine « le bagne. »

Cette réserve d’eau mesure 7 m de long et 2 m30 de haut. L’argile était mélangée avec de l’eau pour confectionner la brique.

Qu’est-ce qui a conduit à la fermeture de la briqueterie ?

En 1942, pendant l’Occupation, l’usine est arrêtée, mais la fermeture officielle a lieu en 1947. Après la guerre, pour reconstruire les bâtiments etc., la brique était moins rentable que le ciment ou le béton. Les ouvriers ont essayé de trouver des investisseurs, mais ils ont dû se faire une raison.

La plupart d’entre eux se sont reconvertis dans la culture de légumes, simplement parce que la marne, qui servait à façonner les briques, est aussi utilisée pour amender les terres des maraîchers, à Langueux.

La Briqueterie de Langueux organise des visites guidées sur réservation. Contacter le tél. 02 96 63 36 66.

Des ateliers d’initiation au modelage sont destinés aux enfants à partir de 3 ans, entre 14 h et 17h, tous les mercredis. Tarif : 5 €

Le musée de La Briqueterie est ouvert au public du lundi au vendredi, de 13h30 à 18h30. Tarifs. Adultes : 6 € ; enfants : 2,50 €

Source Ouest France