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17/08/2015

Terreal: la tuile a fait le bonheur de Roumazières

Terreal compte aujourd’hui 2700 salariés dans le monde. 450 d’entre eux sont employés dans la cité tuilière de la Charente. Une saga qui a débuté en 1907 avec une famille incontournable.
«L’argile, ce n’est jamais qu’un biscuit.» Jean-Luc Maury-Laribière, lui, a croqué dedans à pleines dents.
A 72ans, le patron de Silc(1) à Angoulême est un merveilleux témoin des glorieuses années de Terreal à Roumazières-Loubert. C’est son père, Michel, et lui-même qui ont hissé TBF en tête des tuileries à l’échelle mondiale.
Parce qu’avant Terreal, il y a eu TBF. Comme Tuilerie briqueterie française. «Une grande dame, une grande famille», résume Jean-Luc Maury-Laribière qui ne veut pas verser dans la nostalgie.
Cette entreprise, c’était un héritage de son grand-père, Pierre. Michel l’a remise sur les rails. Jean-Luc, ingénieur chimiste, est venu l’épauler à partir de1969. «Au début des années70, on a inventé une nouvelle technique de fabrication des tuiles.»
En1975, ils décident de créer une usine entièrement automatisée. Osé. «L’investissement représentait deux années de chiffre d’affaires et quatre fois nos fonds propres.»
Les banques étaient alors moins frileuses et le jeu en valait la chandelle. «On pouvait sortir des tuiles de meilleure qualité avec un avantage sur le prix de revient.»
En 1978, les Maury-Laribière doublent la mise. Dans une concurrence stimulante avec les autres tuileries du secteur, une deuxième usine sort de terre. «En moins de dix ans, on a multiplié notre production par quatre. On a construit cinq usines.»
«Je pouvais leur demander la lune»
Ce boom des années 70, Jean-Michel Dufaud, le maire de Roumazières, s’en souvient aussi. Elevé à la culture TBF, il est entré en1972 au service du personnel. Et y a été bercé par les innovations à tout va.
L’entreprise développe les accessoires, lance les tuiles grand format, travaille sur les couleurs, met en place une technologie spécialisée sur les moules… Et engage une politique d’exportation vers la Malaisie, les pays du Sud-Est asiatique, les États-Unis aussi. «Pour avoir une soupape quand il y avait, en France, une baisse d’activité», explique Jean-Luc Maury-Laribière.
«Tous les ans, on faisait plus 20%. Les gars, je pouvais leur demander la lune, ils savaient la trouver», sourit-il encore, saluant notamment le travail de Jean Labarussias, son adjoint, qui avait débuté avec son père. «On n’aurait probablement pas fait tout ce qu’on a fait s’il n’avait pas été là.»
En plus d’être «toujours à l’avant-garde sur les plans technique et commercial», la famille Maury-Laribière développe un véritable esprit d’équipe au sein de l’entreprise. «J’ai essayé d’entretenir l’état d’esprit de mon père, un humanisme vrai», confie Jean-Luc Maury-Laribière. Dans ses usines, jamais de grève. «On n’avait pas de service qualité puisque tout le monde y était sensible, à la qualité.»
Et les associations fleurissent: foot, pêche, vélo… «Sur 500salariés, environ 300 étaient dans une association, note Jean-Michel Dufaud. Il y avait un esprit de corps qui réglait énormément de choses. C’est pour ça qu’on était un peu différent des autres.» L’argile, ce biscuit, a aussi profité à la commune entière. «Roumazières est née avec la tuile, remarque le maire. Dans les années 70, beaucoup de Portugais sont arrivés. En 1990, il y avait près de 1000 employés dans les tuileries. Aujourd’hui, il y en a presque moitié moins. Mais ça reste un poumon», indique Jean-Michel Dufaud.
Son challenge: développer le tissu industriel dans la commune. Parce qu’il le sait bien: «Aujourd’hui, on ne peut plus compter que sur les tuiles pour que notre ville vive bien.»
Un nouveau président à la tête du groupe
Trois semaines de congés annuels imposées au mois d’août. Des mesures de chômage partiel récurrentes... Les années fastes deTBF sont loin derrière Terreal qui emploie aujourd’hui près de 450 salariés à Roumazières-Loubert.
Et les syndicats s’inquiètent. P-DG dugroupe depuis2000, HervéGastinel vient d’être évincé par le conseil d’administration et les actionnaires que sont ING Bank, Park Square Capital et Goldman Sachs Group. Au 1er juillet, Laurent Musy a été nommé président.
Pour Jean-Michel Dufaud, le maire de Roumazières, retraité de Terreal depuis 2008, trois éléments expliquent la situation dans laquelle se trouve l’entreprise aujourd’hui: L’outil de travail s’est usé et on a tardé à prendre la mesure des investissements à réaliser, les produits n’ont pas évolué et le marché s’est cassé la gueule.» Il ajoute: «On a un peu tué l’envie. À Roumazières, l’envie, tout le monde l’avait.»
(1) Séjours internationaux linguistiques et culturels
Source La Charente Libre

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