Des toitures aux sous-sols. De l'industrie au négoce. Des tuiles de Terreal aux canalisations de l'entreprise Frans Bonhomme. Pourtant, Patrick Destang, qui vient de prendre la présidence de cette dernière, leader en France pour la distribution de canalisations et de raccords plastiques, ne change pas vraiment de registre.
Comme l'industriel Terreal, le négociant Frans Bonhomme, qui compte 2.200 salariés et 400 points de vente, est confronté à une chute de ses commandes dans le BTP. Depuis 2011, le secteur décroît… et 2015 s'annonce comme une année noire dans le neuf.
Dans son bureau de Joué-lès-Tours, Patrick Destang ne s'affole pas : « J'ai appris que nous ne pouvions rien contre ce que nous ne maîtrisons pas, énonce-t-il. La question est de savoir ce que chacun, à son échelle, peut changer pour améliorer la situation. J'essaie de transmettre cela à mes collaborateurs. » Une philosophie digne d'un maître bouddhiste, bien que cet amateur de ski, affable, volubile et curieux, s'en défende. Il faut dire qu'à quarante-huit ans, ce dirigeant connaît le monde de la construction. Il y a bâti sa carrière. Après l'Essca Angers et un MBA à Chicago, sur les terres de Philip Kotler, cet homme de marketing est entré, en 1990, au sein de sa branche isolation de Saint-Gobain. Il en a gravi les échelons en Suède, en France et en Angleterre, avant de devenir, en 1999, consultant du BCG à Londres puis de cofonder une start-up.
Dans les pas de Rocky Balboa
Pour illustrer l'agilité d'une entreprise et sa résilience dans un environnement périlleux, il se réfère à un séminaire commercial chez Terreal : « J'avais convoqué "Rocky 3" », s'amuse ce combattant, évoquant le relâchement du boxeur Sylvester Stallone, qui, après avoir tout gagné, profite de sa notoriété, tandis que son adversaire s'entraîne et le fait sombrer en quelques rounds. « Il ne faut jamais penser que nous sommes bons parce que nous surperformons le marché. Plusieurs acteurs du BTP ont eu tendance à le croire », estime Patrick Destang.
Malgré la conjoncture, l'ancien patron du marketing passé aux opérations chez Terreal a conservé les quinze usines du groupe.
Pour autant, son style vise plutôt la victoire aux points : « Si nous avons réussi à passer la crise sans trop de dégâts chez Terreal, c'est parce que toutes les strates de l'entreprise ont participé, sur chaque site, en adaptant leur organisation, en révisant le temps de travail, en modifiant le régime des heures supplémentaires. Je n'ai rien fait seul », glisse ce père de jumeaux, passionné de management.
Chez Frans Bonhomme, il devra d'abord convaincre. Après le fonds d'investissement Cinven, c'est son homologue américain Centerbridge qui a pris les commandes. Et pour la quatrième fois en six ans, les salariés de ce négociant, parfois décrit comme une « machine à cash », craignent de voir débarquer un chasseur de coûts.
Comme Rocky Balboa, Patrick Destang joue l'humilité : il vient de passer une semaine sur le terrain, un jour avec un chauffeur, un autre à l'entrepôt, puis en boutique à Rennes et au Mans. « J'avais envie de connaître le retour du terrain », dit-il. Le président a griffonné soixante-dix pages de notes. Pour l'instant, il reste muet sur la stratégie, mais martèle que Centerbridge « n'est pas un fonds vautour, qui serait là pour essorer Frans Bonhomme ». Il n'hésitera pas à monter sur le ring pour le démontrer.
Source Les Echos par Stéphane Frachet
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