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04/11/2014

Une façade en briques joue avec le relief grâce au BIM

Fin janvier 2015 sera livrée à Beauvais la Maison de la Solidarité et des Familles du quartier Saint-Jean. Initiée par le Conseil Général de L’Oise, elle a pour vocation d’aider et d’orienter les habitants du quartier dans le domaine social et médico-social.
Ni monumental, ni imposant, le bâtiment de deux niveaux se distingue cependant des logements voisins par le mouvement de ses façades et leur matière. « Le mouvement, c’est celui des plans de façades de l’étage qui divergent depuis le centre, au dessus de l’entrée, et qui, par ce recul, atténuent la monumentalité du mur », décrit Hervé Ellena, de l’agence EllenaMehl Architectes.
La matière, c’est la brique qui habille totalement l’édifice. Un habile mouvement dans la pose et la superposition des briques fait apparaître un motif de tissage en losanges sur la façade.
Le projet, qui totalise 1 127 m² de SHON pour un budget de 1,805 million d’euros HT (compris VRD et paysage), a fait l’objet d’un concours de maîtrise d’œuvre mi-2012, remporté par l’agence EllenaMehl en novembre 2012.
Le motif procède d'un double mouvement : débord des briques d'une part, rotation des briques d'autre part. Le bâtiment de deux niveaux est intégralement enveloppé d’un mur manteau en briques. Le mouvement dans la pose et la superposition des briques fait apparaître un motif de tissage en losange sur la façade. Dans le modèle BIM 3D, des couleurs permettent d’identifier les différentes poses de briques. Les poseurs ont monté chaque portion de mur suivant le calepinage coloré.
Les architectes d’un bâtiment public de Beauvais ont conçu le calepinage de sa façade singulière en briques, animée de reliefs en losange, grâce au recours à la maquette numérique 3D qui a également accompagné l’entreprise de pose.
Mur manteau
Dès le concours, l’agence d’Hervé Ellena et Stéphanie Mehl a proposé une façade en briques avec isolation par l’extérieur, selon la technique du mur manteau, en suggérant d’animer la façade avec un motif « tissé » matérialisé par le mouvement des briques.
« Avec un budget assez serré, la proposition de développer un mur manteau en briques pour l’ensemble du projet, y compris le mur de clôture, relevait de la gageure », admet Hervé Ellena. Le budget initial estimé pour le mur en briques se situait autour de 250 euros/m2, compris isolant et échafaudages, pour une surface d’environ 600 m2.
« Nous voulions utiliser une brique simple – de préférence moulée mécaniquement – pour garantir l’expression du motif dont la subtilité pourrait disparaître avec une matière terre cuite trop expressive », explique Hervé Ellena qui note également que les briques moulées main présentent non seulement des variations de taille potentiellement problématique pour une pose non conventionnelle… et qu’elles sont aussi plus chères !
Objet virtuel BIM
« Afin de permettre au motif d’émerger et d’évoluer nous avons créé, dès la phase conception de l’esquisse du concours un « objet virtuel » BIM pour modéliser le motif de briques », détaille l’architecte. Cet objet informatique paramétrique, c’est-à-dire modifiable à l’aide de paramètres à saisir, a été développé par l’agence spécifiquement pour le projet.
« Sur la base de plusieurs matrices mathématiques de dimension paramétrable, il nous a été possible de construire une portion de mur en briques pouvant être répétée en longueur et en hauteur, complète Hervé Ellena. Nous avons créé un motif « bouclé ». »
La matrice a été transposée sur un quadrillage papier pour faciliter la mise au point du motif final, puis les paramètres ont été ressaisis dans l’objet brique.
L’effort initial consacré au développement de l’objet paramétrique a permis de développer parallèlement et quasi indépendamment le projet architectural et le projet du motif, chacun pouvant évoluer séparément.
38 000 briques
Un aspect essentiel dans la mise en œuvre du mur manteau en briques est l’importance du calepinage : idéalement on ne devrait mettre en œuvre que des briques entière ou des demi-briques. Il faut donc pouvoir placer les ouvertures dans la trame imposée par les briques. Cette exigence amenait à dessiner toutes les briques du bâtiment, soit près de 38 000 !
En créant un morceau de mur briques virtuel – répétitif – on pouvait donc maîtriser simultanément la problématique de mise au point du projet en phase concours, le calepinage et la recherche du motif.
Le motif mis au point comprenait sept mouvements de briques différents, en plus de la pose courante plane.
Code couleur
Une fois le concours gagné, le projet a progressivement été affiné dans le cadre courant des phases d’études. L’objet « mur briques » a permis de maintenir la cohérence totale du projet entre plan et façades. A toutes les phases, le projet était modélisé sur un unique fichier cohérent permettant d’obtenir le plan, les façades ou des vues 3D.
Les briques existant dans divers formats, selon les fabricants et selon leur provenance, il était possible de changer toute la façade sans avoir à tout redessiner en modifiant seulement quelques paramètres numériques dans le BIM: taille de la brique, dimension du joint, etc…
« Pour la phase de consultation des entreprises, nous souhaitions que les documents graphiques permettent d’appréhender la spécificité de mise en œuvre des briques, avec une approche didactique évidente, sans toutefois « effrayer » les entreprises, souligne Hervé Ellena. Nous avons donc développé une représentation en « fausses couleurs » permettant d’identifier les différentes poses. Un plan de calepinage intégral de toutes les façades, clair et accessible. Nous avons ainsi fait évoluer l’objet brique en ajoutant dans son « code » la mise en couleur selon la pose de la brique ». Cette opération s’est effectuée sans avoir à replacer toutes les briques dans le projet.
Phase chantier
Avec l’entreprise désignée, Fac’ouest à Rouen, nous avons finalisé le choix de la brique : couleur, mais surtout dimensions de la brique et des joints.
Le changement de dimension de la brique a fait l’objet d’une actualisation des façades quasi instantanée, en modifiant les paramètres de la brique de base. Une brique plus haute à été retenue (65 mm au lieu de 54 mm). La dimension du joint (pose à joint vif) a également été ajustée « en temps réel ».
La méthode de pose mise au point par l’entreprise consiste à dessiner sur chaque brique une ligne de pose correspondant au plan de référence du mur, à l’aide de gabarits en bois colorés de la même couleur que celle du calepinage.
Deux prototypes ont été nécessaires à la mise au point de la technique de pose et à la compréhension par les équipes de l’entreprise. Les différentes portions de façades ont été isolées pour les poseurs, qui ont pu ainsi monter chacune des portions en suivant le calepinage « coloré ».
Conclusion des architectes : « le BIM n’est pas qu’un outil au service de la productivité, il peut aussi s’inscrire dans le processus créatif de l’architecte en permettant de matérialiser une idée et de la faire vivre tout au long de la mise au point du projet pour la porter jusqu’à sa réalisation. »
Source LE MONITEUR.FR

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