Les toitures-terrasses sont montrées du doigt par un cabinet de courtage. En cause, des malfaçons qui seraient dues à des défauts d'exécution. La Chambre syndicale française d‘étanchéité ne nie pas les difficultés, en revanche elle réfute les chiffres annoncés par le cabinet.
Selon Chevreuse Courtage – cabinet spécialisé dans l'assurance de la construction –, la première cause de sinistralité dans les bâtiments d'activité serait liée à des problèmes au niveau des systèmes d'étanchéité en toiture-terrasse. Toujours selon l'assureur, ces sinistres représenteraient 30% des sinistres déclarés. Et cela ne semble pas s'arranger, le cabinet faisant état, en plus, d'une forte augmentation au sein de son propre portefeuille de clients. Sinistres qui relèveraient principalement d'un problème d'évacuation des eaux liées à des défauts d'exécution. Les systèmes proprement dits ne sont pas en cause.
La Chambre syndicale française de l'étanchéité (CSFE), de son côté, d'une part s'interroge quant à la source de ces chiffres et, d'autre part, réfute que le secteur représente la première cause de sinistralité dans le bâtiment, bâtiments d'activité ou autres: « Les chiffres annoncés par le cabinet de courtage ne représentent pas la réalité, notre secteur n'est pas celui qui affiche la plus grande sinistralité, explique Philippe Driat, délégué général de la CSFE. S'il y avait 30% de sinistres, la profession serait à la dérive, personne ne voudrait plus assurer les étancheurs. Ce qui me gêne, c'est qu'à partir d'une statistique interne, on en tire des généralités ». En matière de chiffres, Philippe Driat préfère plutôt se baser sur ceux de l'Agence qualité construction (AQC) publiés dans le Tableau de bord Sycodès 2011 : « Si l'on reprend les chiffres de l'AQC qui sont librement téléchargeables sur le site Internet de l'institution, on s'aperçoit que les sinistres liés à l'étanchéité des toitures-terrasses, tous bâtiments confondus, sont inférieurs à 10% pour la période 2002/2010 et que le coût relatif de ces désordres pour la même période est de 1,8% ». Un coût d'ailleurs en baisse par rapport à la période précédente 1995/2001 où il était de 2,2%. Et Philippe Driat d'ajouter : « Ce que l'on constate d'une manière générale pour notre activité, c'est que tout ce qui est lié aux sinistres de nature décennale est en baisse ».
Eviter la pénétration d'eau
Néanmoins, les sinistres existent et personne ne le nie. Pour Philippe Driat : «Ces derniers sont à chercher le plus souvent au niveau du traitement des points singuliers. Ils surviennent également lorsque, pour des raisons de maintenance ou encore pour l'installation d'une antenne, les techniciens marchent sur le système d'étanchéité de toiture-terrasse normalement non accessible. C'est un sujet de préoccupation important pour nous. Il en est de même pour l'entretien qui n'est pas toujours bien réalisé ». Sur ce dernier point, le Cabinet Chevreuse note également un relâchement : « Nous constatons que l'entretien est l'un des postes budgétaires touchés par la recherche d'optimisation des coûts. Un constat avéré avec la crise. Si les contrats d'entretien curatifs (rapport d'étanchéité) et préventifs (nettoyage) sont dans l'ensemble correctement mis en œuvre les deux premières années, trop souvent, ces derniers ne sont pas renouvelés à mi-parcours ». Des raisons économiques sont également évoquées pour les défauts d ‘exécution : « La couche d'étanchéité et les éléments qui émergent des toitures-terrasses doivent être protégés et relevés sur tous les bords pour éviter tout risque de pénétration de l'eau. La recherche abusive d'économie ou de gain de temps à la pose pourrait en partie expliquer les défauts de mise en œuvre en rognant par exemple sur la surface de marouflage entre deux lés ». Le Cabinet Chevreuse met également en cause les systèmes siphoïdes d'évacuation des eaux : « Ces derniers sont susceptibles de générer des risques majeurs : désarmement, voire effondrement de la canalisation en cas de défaut de mise en œuvre et/ou d'erreurs lors des calculs de vibration ou de mise en charge ».
Entretien des systèmes
Concernant les systèmes siphoïdes, ils ont été mis en observation en 2008 par l'AQC et, dans sa Fiche pathologie consacrée à « l'effondrement des couverture légères sous le poids de l'eau », celle-ci insiste sur l'indispensable entretien de ces systèmes d'évacuation des eaux pluviales par dépression. Dans cette même fiche pathologique, il est également précisé « que les professionnels souhaitant prescrire ou mettre en œuvre des techniques non traditionnelles, telles que les systèmes siphoïdes, doivent se rapprocher de leurs assureurs. Ces systèmes ne relèvent pas des dispositions courantes du DTU. Il s'agit de techniques non traditionnelles (mises d'une manière générale en observation par la C2P) et relevant des procédures d'Avis technique ». A noter, les produits ne bénéficiant pas d'Avis technique sont systématiquement mis en observation.
Pour la mise en oeuvre des systèmes d'étanchéité et particulièrement la gestion des points singuliers, Philippe Driat précise : « Nous avons réalisé sur ce sujet un travail dans les années 2000 où nous pointions du doigt, avec l'AQC les difficultés. Le résultat de ce travail a été intégré au DTU lors de sa refonte en 2004. Nous avons également rédigé des fiches à destination des maîtres d'ouvrage pour l'utilisation des toitures-terrasses ». Mais les problèmes ne viendraient-il pas tout simplement du manque de formation des étancheurs : « Il existe un CAP d'étancheur mais il faut reconnaître que le gros de la formation se fait sur le tas. Il y a aussi quantité de formations réalisées avec les fabricants ».
FOCUS
Les chiffres du Cabinet Chevreuse
L'année dernière, le Cabinet Chevreuse a eu à gérer 700 sinistres. Parmi ceux-ci, 30% concernaient des sinistres liés à l'étanchéité. Sinistres dont les origines sont diverses : étanchéité des toitures-terrasses, systèmes siphoïdes... Ces sinistres concernent les bâtiments d'activité : bâtiments industriels, unités de production, bureaux, sites commerciaux, établissements recevant du public (ERP).
Source Le Moniteur par Stéphane Miget
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire