Ils dénonçaient la plus-value monstre réalisée par les ex-propriétaires.
Quand le groupe Saint-Gobain a cédé les briqueteries et les tuileries Terréal aux sociétés d'investissement américaine Carlyle et française Eurazeo en 2003, il en a tiré 400 millions d'euros. Deux ans plus tard, les deux fonds réussissent à revendre le groupe de matériaux à la société financière LBO pour 860 millions. La cession doit être finalisée en novembre. «Ou Saint-Gobain n'était pas un très bon vendeur, ou Carlyle s'est très bien débrouillée, commente Mohamed Oussedic, secrétaire général de la fédération CGT verre et céramique, mais les actionnaires des deux fonds d'investissement ont dû être contents.»Au culot. Après des pétitions et des demandes de négociation, plus de 60 % des salariés français du groupe se sont mis en grève, vendredi, pour réclamer quelques retombées de cette plus-value monstre. Ils sont même allés jusqu'à bloquer plusieurs sites de fabrication. Tout au culot. De leurs deux ex-propriétaires, ils exigeaient une prime de 1 300 euros par ouvrier. Et au nouvel actionnaire, l'intersyndicale CGT-CFDT-FO avait demandé des garanties sur la pérennité de l'activité, une revalorisation des salaires et des qualifications inchangées depuis vingt-cinq ans. La direction de LBO, qui a d'abord refusé de négocier, a finalement trouvé un compromis hier dans la soirée : 500 euros de prime pour chaque employé, une augmentation minimum de 1 % des salaires, ainsi que la prise en charge de 50 % des jours de grève.
C'est la culbute réalisée par les deux fonds d'investissement qui a réveillé les salariés des fabriques de briques et de tuiles. En 1996, Saint-Gobain achète le futur groupe Terréal. «Il y a eu une mise en avant de la marque, c'était une stratégie à court terme mais avec une politique cohérente de développement par des rachats de petites entreprises familiales», explique Mohamed Oussedic. La tempête de 1999 a par ailleurs dopé le commerce de la brique et de la tuile. Toujours est-il qu'en vendant, en 2003, Terréal pour 400 millions d'euros, Saint-Gobain pense avoir fait une bonne affaire. Deux ans plus tard, les petits malins de Carlyle et Eurazeo vont parvenir à plus que doubler la mise.
Petites unités. «C'est simple, ils ont pressé au maximum sur les effectifs sans investir sur le potentiel industriel de la boîte», analyse Mohamed Oussedic. Le groupe est composé d'unités de moins de cinquante salariés disséminées notamment en Charente, en région parisienne et dans les Pyrénées-Orientales. «Les fermetures sont passées comme une lettre à la poste, nous n'étions même pas au courant. Dans ce genre d'entreprise, les employés sont isolés et à la merci des directions.»
Dans le secteur, ce conflit était sans précédent. «Il n'est pas courant que des ouvriers disent à leur ancien patron de partager les sous qu'il a gagnés avant de partir», justifie avec malice le syndicaliste, pour qui cette prime est un simple «retour pour services rendus au groupe».
Source Libération
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