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14/08/2023

Briqueterie : Rairies Montrieux annonce la couleur au village des athlètes

Les parements en terre cuite émaillée fabriqués en Anjou par cette entreprise du patrimoine vivant habillent sept bâtiments du village olympique.

L’argile extraite à proximité de l’usine est broyée, puis étirée avant d’être transformée en briques.

Rose, bleu, vert, blanc ou terre naturelle… La palette de couleurs des parements en terre cuite émaillée de l'îlot D (Les Quinconces) du village olympique ne doit rien au hasard. Elle a été imaginée avec soin par l'architecte-urbaniste Anne Mie Depuydt (Uaps), coordinatrice de ce vaste projet de plus de 48 000 m² porté par Icade, la Caisse des dépôts et CDC Habitat, où œuvrent aussi les agences ECDM, Brenac & Gonzalez & Associés, Atelier Pascal Gontier, NP2F et Post-Office Architectes. « Avec le plasticien Philippe Fangeau, nous avons défini cette palette inspirée du tableau “Evidence” du grand peintre américain Philip Guston, raconte l'architecte belge. Ce ne sont pas des couleurs du nuancier RAL [utilisé dans l'industrie et la construction, NDLR] et, pour parvenir aux teintes exactes d'émail voulues, j'ai contacté Rairies Montrieux dont les équipes ont été d'une aide précieuse. » En octobre 2020, Anne Mie Depuydt s'est donc rendue aux Rairies, une petite commune située près d'Angers (Maine-et-Loire), pour visiter l'usine familiale et préciser sa demande. « Nous avons l'habitude de travailler directement avec les architectes, explique Rémy Montrieux, le P-DG de la briqueterie. Avec notre service R & D, nous avons élaboré ces teintes, mais également des types de plaquettes très spécifiques que nous n'avions pas au catalogue. » Car, outre la couleur, les architectes ont souhaité des formes bien particulières, en triangle, ondulées et convexes, pour rythmer les façades. En moins d'un mois, l'entreprise a réalisé des prototypes et a fait usiner par une société voisine les filières en acier nécessaires à la production.

500 000 plaquettes à produire. Pour ce chantier exceptionnel qui comprend l'habillage de 5 400 m2 de façades, quelque 500 000 plaquettes devront être façonnées suivant un procédé ancestral. L'argile crue, extraite à proximité dans l'une des trois carrières de l'entreprise, est broyée, étirée, séchée et cuite durant environ trente-six heures entre 800 et 1 200 °C. Une fois refroidies, les plaquettes passent à l'émaillage avec l'application de deux couches suivie d'une dernière cuisson de vingt-quatre heures.

Suffisamment étalée dans le temps, cette production spécifique - qui représente un chiffre d'affaires de 400 000 euros - n'a pas nécessité de renfort particulier en main-d'œuvre, d'autant plus que la PMI, en forte croissance, a vu ses effectifs passer de 77 salariés en 2020 à 120 en 2023. Des périodes fastes comme celle d'aujourd'hui, elle n'en a pas toujours connu et a même déposé le bilan en 2015. La briqueterie réalisait alors 4 M€ de chiffre d'affaires, essentiellement avec des carreaux en terre cuite. « Nous nous sommes alors tournés vers les produits de façades, portés par l'essor de l'ITE. Dans le même temps, les produits traditionnels cuits dans nos fours à bois sont redevenus tendance », raconte Rémy Montrieux.

A la tête de l'entreprise familiale depuis plus de cinquante ans, le dirigeant a préparé l'avenir en réalisant d'importants investissements ces dernières années, comme un nouveau four à gaz, plus économe en énergie, et un robot d'empaquetage. D'autres projets sont dans les cartons comme la construction d'une extension pour l'usine. Ils se-ront conduits par Paul-Vincent Diquéro, récemment nommé directeur général, et quatre autres cadres appelés à reprendre ce fleuron du patrimoine industriel, Rémy Montrieux ayant repoussé toutes les offres de reprise.

Source Le Moniteur par Jean-Philippe Defawe