Alors qu’une deuxième enquête publique devrait s’ouvrir en septembre, le projet de carrière à Cahaignes continue de mettre dans l’embarras la mairie de Vexin-sur-Epte (Eure). Pointés du doigt par les opposants au projet depuis mai 2022, Thomas Durand, le maire, et son équipe, tentent tant bien que mal d’apaiser les tensions.
Lors de la dernière réunion publique, en mai, ce dernier a annoncé son retrait du projet en raison d’une situation de conflits d’intérêts. Une nouvelle qu’ont eu du mal à digérer les anti-carrières.
Pour rappel, Terreal a racheté le projet d’exploitation d’une carrière à la société Laviosa qui devait justement utiliser un terrain de la famille Durand à Tourny.
Étant désormais « partie prenante dans ce dossier », le maire a donc décidé de passer la main à son adjoint en charge de l’urbanisme, Jérôme Richard.
« Le fait que Terreal exploite un terrain déjà utilisé à Tourny pourrait permettre d’éviter l’extension de la carrière de Cahaignes dans les prochaines années. »
C’est en tout cas ce qu’espère l’adjoint mais dans les faits, l’exploitant reste encore très flou sur ses intentions :
« Actuellement, Terreal a besoin de nouvelles ressources pour continuer son activité. Sans ça, l’usine risque de fermer. Toutefois, nous demandons à Terreal de rechercher, dès maintenant, d’autres alternatives pour assurer son approvisionnement. »
Jérôme Richard, adjoint à Vexin-sur-Epte
15 ans d’exploitation
En effet, la durée d’exploitation est estimée à 15 ans. « Nous aimerions moins », avoue l’adjoint.
Par ailleurs, entre le moment où le projet est présenté et le début de l’exploitation du terrain, il peut s’écouler 5 à 10 ans. D’où l’intérêt de prévoir l’avenir dès maintenant.
« Terreal doit prendre ses responsabilités et ne pas nous mettre devant le fait accompli en réclamant une extension de la carrière de Cahaignes, ce qui nous rapprocherait du projet initial (une carrière à 50 mètres des habitations ndlr). C’est le scénario redouté et je le trouve inacceptable. Nous avons besoin de garanties de la part de Terreal. »
Tiraillée entre la colère des habitants et une marge de manœuvre étroite (la décision finale revenant au préfet), l’équipe municipale assure tout faire pour limiter les nuisances.
« Les habitants ont complètement raison de défendre leur territoire et je les félicite pour ça. Nous aussi, nous agissons dans ce sens. On attend de nous une opposition radicale mais ça desservirait l’intérêt de tous car sans discussion avec les différents acteurs, le projet passerait tel quel, y compris la première version, plus brutale. »
En effet, le premier projet, qui devait s’installer à 50 mètres des habitations, était déjà conforme au Code de l’environnement, Code sur lequel se base le préfet pour autoriser un projet comme celui-ci.
« Nous ne sommes pas les défenseurs de la carrière mais nous devons rester lucides. Si nous ne sommes pas dans le dialogue, ça se jouera au tribunal et nous perdrons puisque le projet est légal », appuie l’adjoint.
Le ton est donné. Ce projet, ce n’est pas celui de Vexin-sur-Epte, il n’a d’ailleurs aucun intérêt pour la commune. Ce serait peut-être même une épine en moins dans le pied si le projet se faisait retoquer par le préfet. Pourtant, ce scénario semble peu probable. Alors, les élus locaux misent sur les voies légales pour limiter l’impact de cette carrière en s’appuyant sur les différents acteurs du territoire.
Par ailleurs, il rappelle que le commissaire enquêteur, lors de la première enquête publique, avait donné un avis favorable au projet tout en apportant des prescriptions à Terreal.
Des données encore vagues
Alors que la société devrait déposer dans les prochains jours un dossier de recevabilité à la préfecture, Jérôme Richard appelle déjà les habitants à exposer leurs inquiétudes lors de la seconde enquête publique, qui devrait durer un mois.
« Il y aura forcément des prescriptions techniques du préfet. Est-ce qu’elles seront satisfaisantes? Je fais confiance pour cela aux services de l’État. »
Pour le moment, l’adjoint estime que Terreal reste trop vague sur certaines données primordiales : le trafic routier, le flux de camions et le devenir de la carrière. Au sujet de ce dernier point, Jérôme Richard imagine déjà un scénario :
« Notre levier, c’est la partie remblai. Si on enlève cela, on divise par deux le flux de camions. Nous aurions donc à disposition un sol argileux et donc étanche. Nous pourrions en faire un point d’eau notamment pour l’agriculture. »
L’adjoint insiste aussi sur la nécessité de reboiser cette zone, propice à la biodiversité et qui permettrait aussi de faire barrage à l’extension de la carrière. « Pour cela, je compte sur l’exploitant agricole et sur Terreal », souligne-t-il.