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19/06/2022

La terre naturelle des potiers de Soufflenheim

Les potiers de Soufflenheim ont le droit de travailler avec la terre locale depuis le 12ème siècle. Certains en extraient plusieurs dizaines de tonnes par an.

Rund um. À Soufflenheim, terre de potiers, les artisans ont le droit de travailler avec la terre naturelle locale depuis le XIIème siècle. Certains d'entre eux perpétuent la tradition et ne jurent que par cet argile qu’ils cherchent dans une carrière dans la forêt de Haguenau. D'autres préfèrent s'approvisionner ailleurs.

À la sortie du village, ce matin-là, Joseph Pfister ouvre la grille de la carrière. Avec son fils, juchés sur des pelleteuses, ils s’apprêtent à prélever des tonnes de terre argileuse, dans la forêt de Haguenau. C’est la matière première de ce potier, celle qu’il utilisera avec ses employés pour fabriquer terrines, moules et décorations. "Pour moi, la terre de Soufflenheim est la meilleure!" assure Joseph Pfister. "Elle est bien grasse, poreuse, et contient de la silice. Cela permet à nos poteries de bien supporter les chocs thermiques, de passer directement du frigo au four par exemple".

Un droit hérité du XIIème siècle

Joseph Pfister est devenu potier depuis qu’il a épousé Sabine Friedmann, héritière de la plus ancienne maison de poterie de la commune. Avec trois autres collègues, ils ont fondé un GIE (Groupement d’Intérêt Economique) pour continuer à utiliser la terre naturelle de Soufflenheim ; un droit octroyé au XIIème siècle par l’empereur Frédéric Ier de Hohenstaufen, dit Barberousse. Camille Scheydecker, le maire (DVD) de Soufflenheim, nous raconte la légende locale : "A l’époque, des potiers auraient offert une petite crèche à l’empereur, et pour les remercier, il les aurait autorisés à travailler avec la terre naturelle du village".

La terre de Soufflenheim séduit, mais pas tout le monde

Jolie histoire. Mais pas suffisante pour convaincre tous les artisans d’utiliser l’argile des environs. Sur dix potiers, la moitié utilise la terre de Soufflenheim. Pierre Siegfried, gérant de l’entreprise Siegfried-Burger, nous explique que pour lui, la qualité n’y est pas. "La terre de Soufflenheim contient trop de sable. Et les poteries ne ressortent pas assez fines". De son côté, il choisit de faire venir sa terre de la région du Westerwald, en Allemagne, pour "garantir une qualité constante". Une qualité de fabrication mise en avant par une IGP (Indication Géographique Protégée) obtenue en mai, pour l’association des Potiers d’Alsace, de Soufflenheim et Betschdorf.

En termes de prix, difficile de déterminer si les poteries façonnées à partir de la terre argileuse locale sont moins ou plus chères que celles des collègues qui s’approvisionnent ailleurs (et donc paient leur matière première). Les poteries, aux motifs traditionnels ou plus modernes, sont aussi diversifiées que les goûts des clients qui les achètent. Et qui pour certains, d’après Joseph Pfister, "viennent spécialement pour la terre de Soufflenheim."

Source France 3 par Carine Feix