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03/11/2018

Chez Aupeix, à Saint-Hilaire-les-Places, on façonne encore les tuiles comme au XVIIIe siècle

Chez Aupeix, à Saint-Hilaire-les-Places, on façonne encore les tuiles comme au XVIIIe siècle Laurent Debord (à droite) a pris la suite de Michel Aupeix à la tête de la tuilerie du même nom. Ce dernier l'a connu petit garçon et n'a pas été surpris de son envie de faire perdurer ce savoir-faire.

La tuilerie Aupeix, située à Saint-Hilaire-les-Places, fait partie des dix dernières de France à produire des tuiles plates. Un savoir-faire ancestral qui se transmet de bouche à oreille ou presque depuis huit générations. La neuvième, incarnée par Laurent Debord, révèle quelques secrets de fabrication...
Basée à Saint-Hilaire-les-Places, la tuilerie artisanale Aupeix participe, du 25 au 28 octobre 2018, au salon international du patrimoine culturel au Carousel du Louvre à Paris. Un premier grand rendez-vous pour Laurent Debord, qui en a pris la direction depuis le 1er octobre 2018.

Neuvième génération

Il incarne la neuvième génération de dirigeants de cette vénérable entreprise familiale. Mais s’il ne s’appelle pas Aupeix, comme Michel, qui vient de faire valoir ses droits à la retraite, c’est tout comme : il a grandi juste à côté. Enfant, il malaxait l’argile comme d’autres la pâte à modeler. « J’adorais faire des barrages ! En plus, mon arrière-grand-père était tuilier, je renoue donc avec une tradition familiale », avoue l’ancien ingénieur chimiste, pas peu fier.

Pas mécontent non plus d’apprendre un nouveau métier et de contribuer à sa pérennité. « Il y a eu jusqu’à douze tuileries à Saint-Hilaire-les-Places, il n’y en a plus que deux », compte celui que Michel Aupeix surnomme affectueusement le « boujat », autrement dit l’apprenti.

Car ici, avec deux salariés, voire un troisième en cas de besoin, le patron aussi doit être capable de mettre la main à la pâte. « Il n’y a pas vraiment de formation, on apprend sur le tas et il ne faut pas avoir peur de plonger les mains dans l’argile. Il y a aussi un aspect mécanique avec les machines, qui sont d’époque. Il faut être polyvalent », résume Michel Aupeix.

A la demande
Alors, qu’ont donc de si particulier les tuiles de chez Aupeix ? « Elles sont belles ! » s’esclaffe Laurent Debord, qui précise, plus sérieusement : « nous sommes capables de produire à la demande, par exemple quelques tuiles pour une réparation. On s’adapte aussi bien aux dimensions qu’aux coloris ».

Trois teintes sont possibles : rouge, orange ou brun, auxquelles on peut apporter toutes les nuances imaginables en patinant les tuiles à la main avec du sable de différentes couleurs lui aussi selon l’effet recherché.

« On compare souvent notre métier à celui de pâtissier : nous aussi, on pétrit et on fait des gâteaux »
Laurent Debord, nouveau dirigeant de la tuilerie Aupeix

Mais tout commence plus tôt, beaucoup plus tôt. Un an avant, très exactement, au moment où on extrait la terre d’un des deux carrières propriété de l’entreprise, l’une à Saint-Hilaire-les-Places et l’autre en Dordogne, et qu’on la stocke sous le vaste hangar.

Le but ? « L’argile, c’est une matière vivante, il faut la laisser respirer. Elle sera plus homogène et plus facile à travailler », insiste Michel Aupeix. Après deux sessions de broyage, la voilà prête à être modelée.

Comme une valse
Ensuite ? « Une tuilerie, c’est comme une valse : ça fonctionne en trois temps », illustre Laurent Debord. Première étape : la production, autrement dit le moulage.

Deuxième étape : le séchage, qui dure deux nuits et une journée, « car le taux d’humidité contenue dans l’argile va l’empêcher de cuire ».

Troisième étape : la cuisson, donc. 25 heures à plus de 1.000 °C. La tuilerie Aupeix possède deux fours à gaz, qui permettent aussi de réchauffer le séchoir.

Environ 20.000 tuiles en moyenne sont produites chaque semaine. Pour se faire une idée, un toit complet comporte entre 12 et 15.000 tuiles.

Des toitures célèbres
Les tuiles façonnées chez Aupeix servent actuellement à la restauration à Pierre-Buffière de la toiture de la maison de Guillaume Dupuytren, fameux anatomiste et chirurgien militaire de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle. On les retrouve également sur la toiture du château de Beynac, village classé de la vallée de la Dordogne, ainsi que sur l’église de Campagne, à deux pas des Eyzies, deux monuments historiques périgordins en pleine cure de jouvence.

La clientèle de la tuilerie Aupeix se décompose en trois tiers quasi-égaux entre les particuliers, les collectivités locales et les professionnels. Laurent Debord aspire à développer la part des particuliers. 80 % des tuiles partent hors de la Haute-Vienne. Certaines ont même rejoint un jour la Californie...

Source Le Populaire par Thomas JOUHANNAUD

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