Les sourires de novembre 2010 sont bien loin. Région, Département et municipalité de Saint-Papoul participaient alors à l'inauguration d'une déviation d'1,3 km pour relier les RD 103 et 126, et épargner au centre du village le passage des poids lourds ralliant la carrière d'argile. Une véritable Arlésienne qui prenait corps après 20 ans d'atermoiements. Six ans plus tard, la réalisation, chiffrée à 363 000 €, prend des airs de cadeau empoisonné, en tout cas pour la commune. En janvier 2016, la cour administrative d'appel de Marseille condamnait solidairement la commune et le Département à verser 80 000 € à un couple propriétaire d'une maison achetée en 2004, devenue en 2010 point de passage de la déviation.
Un formidable imbroglio
140 camions par jour du lundi au vendredi de 6 h à 22 h, un bruit supérieur à la valeur limite de 60 décibels, des dépôts de terre rouge provoqués par le passage des 35 t : voilà les éléments qui avaient mené l'instance à donner gain de cause au couple sur la perte de valeur vénale et des troubles de jouissance.
Fin octobre, la déviation a fait son retour devant la justice. Avec un autre jugement de la cour marseillaise et une mauvaise nouvelle de plus pour la municipalité. C'est un formidable imbroglio qu'a dû démêler la juridiction, sur la base d'une décision du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, en juillet 2015. Le juge avait alors rejeté la requête de la commune, qui demandait la condamnation solidaire de la SAS René Gaxieu, chargée de la mission de maîtrise d'œuvre, de la SAS Guintoli, chargée des travaux de terrassement, et du Département, soutien technique et financier, à lui verser une provision de 1,17 M€ au motif des désordres constatés sur cette fameuse déviation. Un quatuor auquel est venue s'ajouter en appel, initié par la mairie, la société HDI Gerling Industrie Versicherung, assureur des travaux, guère désireux de payer les dommages si la justice devait les reconnaître.
1,13M€ de travaux de reprise
Dans les multiples mémoires en défense déposés par les parties, une même volonté : qu'une éventuelle faute reconnue soit portée au «crédit» d'un autre acteur. Une attente plus que comblée. La cour a en effet rejeté la requête de la commune. Une ordonnance rendue sans que ne soient certes contestés le «délitement du revêtement», des «désordres de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination», une nature des sols «insuffisamment prise en compte» ainsi que la «négligence» des entreprises impliquées. Et de citer le rapport d'expertise évaluant à 1,13 M€ les travaux de reprise. Mais, et c'est là la vérité de la justice administrative, l'instance a considéré que la commune aurait dû rester sur les dommages visibles à réception de l'ouvrage, et non en vertu de la responsabilité décennale. Et a aussi conclu que les travaux de reprise, largement supérieurs au coût initial, conféreraient une plus-value à l'ouvrage qui ne correspondrait plus à celui originellement commandé. Un point qui a, entre autres, mené au rejet de la requête. Laissant la commune seule avec le fardeau de cette déviation autrefois tant désirée.
Source La Dépêche du Midi par A. Ca.
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