Pages

06/08/2016

ECOMUSEE CREUSOT-MONTCEAU : Le point historique sur la villa Perrusson

Ce qu’était et ce qui a fait la renommée de la villa Perrusson à Ecuisses.
Présentation de la villa Perrusson et de son jardin
Située à Ecuisses, la villa Perrusson représente le fleuron des édifices construits par la famille du même nom, à proximité des établissements de production de céramique qu’ils ont fondés en Bourgogne et en Charente au XIXe siècle. Les éléments décoratifs en céramique ont été créés et réalisés par l’usine Perrusson de tuiles et ornements autrefois attenante à la villa.
La villa Perrusson est un ensemble architectural constitué de deux parties : un corps de logis édifié en 1869, dit « pavillon Perrusson », auquel est adossée, en 1890-1900, une aile nord, dite « pavillon Desfontaines ». Ce dernier est l’œuvre de l’architecte Tony Ferret, architecte départemental de l’Ain entre 1884 et 1916. Chacun des pavillons est aujourd’hui identifié par le nom des familles Perrusson et Desfontaines, qui occupèrent les lieux durant six générations. Le pavillon Desfontaines a été construit par la famille Perrusson mais a pris le nom de la famille Desfontaines, qui l’a le plus longuement occupé. Les liens entre deux familles ont été tissés par le mariage de l’une des filles de Jean-Marie Perrusson à Marius Desfontaines.
Historiquement, la villa est entourée de plusieurs corps de bâtiments : une orangerie, un poulailler-pigeonnier, une serre et des écuries. Le terrain est partagé en deux espaces, l’un fonctionnel est consacré aux cultures potagères ; l’autre a une fonction d’agrément : c’est le parc paysager qui entoure l’édifice.
La famille Perrusson et l’aventure de la céramique
Les établissements Perrusson comptent parmi les nombreux sites de production de céramiques architecturales établis, à la fin du XIXe siècle, sur les rives du canal du Centre. Aussi loin que les documents d’archives permettent de le constater, le nom Perrusson se trouve lié aux voies d’eau. À Écuisses, en 1860, Jean-Marie Perrusson, fils d’un batelier, se lance dans la fabrication de pièces produites à partir d’argiles extraites sur place.
Les Perrusson n’auraient probablement pas vécu l’aventure de la céramique sans le développement des entreprises Schneider et Cie au Creusot, de la Grande Tuilerie de Bourgogne à Montchanin et, dans une moindre mesure, de la Compagnie des mines de Blanzy à Blanzy-Montceau, dont ils étaient les prestataires de service. Cette activité de voiturier par eau leur a fourni un observatoire de choix des tendances de l’économie.
Vers 1860, les Perrusson décident d’abandonner le voiturage par eau comme activité exclusive et se lancent dans l’industrie céramique, modestement d’abord, sous la forme d’une briqueterie en 1860, puis d’une tuilerie en 1862. L’ascension sociale est rapide. Les activités de voiturage par eau ont procuré à la famille une certaine aisance ; en l’espace d’une dizaine d’années, entre 1864 et 1870, la famille Perrusson accède au rang de notables. Elle abandonne alors la demeure familiale bâtie à Saint-Julien-sur-Dheune et s’en faire construire une autre, près de l’usine, du canal du Centre et de la voie ferrée, là où s’est déplacé le centre vital de la commune d’Écuisses.
La villa Perrusson, deux pavillons pour une résidence
La résidence Perrusson-Desfontaines est une construction composée de deux parties, édifiées successivement par la même famille patronale en charge de l’usine de tuiles et ornements attenante à la villa. Les deux parties de l’édifice, ou pavillons, sont respectivement construits en briques et pierres. La toiture est composée de tuiles mécaniques ou de tuiles écailles vernissées posées sur une charpente en sapin. L’aile sud est composée d’un étage avec loggia, rehaussé de combles ; l’aile nord comprend deux étages avec tour et tourelle, un oriel (fenêtre en encorbellement faisant saillie sur un mur de façade) et un fronton en façade.
Le pavillon Perrusson
Edifié en 1869, le pavillon Perrusson est une construction de plan rectangulaire dont les façades principales sont orientées à l’est et à l’ouest.
Au centre de la façade est, une loggia se détache sur un avant-corps du rez-de-chaussée. Cette loggia est couverte d’un toit de zinc bombé reposant sur des colonnettes. Elle est surmontée d’un fronton de pierres et briques.
Sur la façade ouest, la travée centrale est sommée d’une grande lucarne comportant une double baie. Un perron donne accès aux deux portes axiales.
Les cinq travées des deux élévations est et ouest sont régulièrement et symétriquement distribuées sur les deux niveaux. Un bandeau de pierre de taille court sans interruption à hauteur du plancher de l’étage. Une corniche de pierre sur entablement de brique se développe également sur le haut des façades. Un soubassement de pierres calcaires dures en débord assoit le bas des élévations.
Chaque façade est cantonnée par un chaînage brique et pierre sur angles et autour de la travée centrale. On retrouve également, autour des baies, des entourages en saillie alternant brique et pierre, avec arcs surbaissés formant linteaux. La maçonnerie des parements est enduite au ciment. Des médaillons de terre cuite en haut-relief à motif géométrique ou végétal soulignent les allèges de l’étage. Des panneaux plus ornementés composent également, à ce niveau, la balustrade de la loggia en avant-corps sur la façade est.
Le toit en tuiles mécaniques vernissées est muni de chéneaux à plate-bande de zinc. Quatre souches de cheminées symétriques accentuent cette composition rigoureuse et sobre. Sur le faîtage, un décor en crête de terre cuite alterne avec des épis de poinçons. Un épi plus développé accentue le poinçon de croupe.
A l’origine, la toiture devait être symétrique, la croupe nord ayant été supprimée pour raccorder le bâtiment au pavillon Desfontaines, construit après 1889.
Le pavillon Desfontaines

Le pavillon Desfontaines est plus complexe dans son organisation. Trois niveaux se superposent sur des compositions qui varient pour chacune des élévations. A ce corps de bâtiment est accolé une tour de plan barlong (de forme allongée) et une tourelle.
La toiture principale, plus pentue que celle du pavillon Perrusson, se termine en croupe à l’est et à l’ouest. La toiture de la tour nord, d’une pente très accentuée, comporte également quatre versants. La tourelle est coiffée d’un petit dôme, lui-même couronné d’une lanterne à coupole. Toutes ces toitures sont couvertes par des tuiles écaille vernissées formant des motifs en trois tons. Les crêtes de faîtage, les épis de céramique vernissée, les cheminées couronnées de mitres en relief accentuent cette volumétrie très contrastée. Ces ornements sont identiques à ceux déjà décrits pour le pavillon Perrusson.
Les élévations sont marquées de bandeaux en saillie qui déterminent trois niveaux. Les deux premiers niveaux sont, comme le pavillon Perrusson, cantonnés de chaînage, avec les entourages de baies également réalisés en alternance saillant, soulignant un étage d’attique, support d’une succession de médaillons de terre cuite dans un cadre rectangulaire. Trois grandes lucarnes à fronton éclairent ce niveau sur l’axe de chacune des élévations.
La façade nord comporte également un balcon à l’étage, avec une porte-fenêtre, sous un fronton cintré.
La façade ouest, sous la lucarne d’axe, présente deux niveaux de baies simples. On retrouve également des baies sur le fût de la tourelle d’angle, qui reprennent strictement le vocabulaire décoratif de cet ensemble, avec leur entourage brique et pierre. Une maçonnerie de pierre dure est également employée comme soubassement de ce pavillon, interrompue par une porte d’entrée sur le côté est de la tour et une porte de service dans l’angle sud-ouest, toutes deux desservies par des perrons en pierre. Les bandeaux et corniches supérieurs sont réalisés en ciment, en respectant parfaitement les profils des éléments de pierre visibles sur la partie plus ancienne du pavillon Perrusson. La cheminée située au-dessus de la porte d’entrée a été remplacée par une souche moderne qui dessert la chaudière par une saignée visible sur le parement extérieur.
Source : « Ecuisses, Maison Perrusson, Etude préalable de restauration du clos et du couvert », Frédéric Didier, architecte en chef des monuments historiques, mai 2008.
Une « maison-catalogue », vitrine d’un savoir-faire
Chargée d’éléments décoratifs issus de la production de l’entreprise, la villa sert à exposer, ostensiblement, le catalogue de l’usine. Les commanditaires invités à déjeuner peuvent ainsi apprécier, sur pièce, la qualité des éléments céramiques présents sur les façades, décorant les parois intérieures de l’oriel, les pavements, les plafonds. On parlerait aujourd’hui de plan marketing et de showroom. Une large ouverture est judicieusement ménagée dans le parc arboré, offrant aux voyageurs de la ligne de chemin de fer une vue imprenable sur la villa et ses décors.
La lanterne qui orne le pavillon Desfontaines est présente sur le pavillon qui représente l’entreprise lors de l’exposition universelle de 1889 à Paris. Aucun des éléments de décor constitutif de ce lanternon ne figure aux catalogues de l’entreprise qui sont parvenus jusqu’à nous. Il est probable que l’ouvrage, constituant un unicum, ait été réemployé pour coiffer triomphalement le pavillon construit au même moment.
La villa Perrusson est située à proximité du canal du Centre dont le percement, débuté en 1784, révéla des gisements d’argile qui favorisent l’essor de la « vallée de la céramique » de Digoin à Chalon. De la quarantaine d’entreprises industrielles de la période 1820-1960 ne subsistent aujourd’hui que cinq unités en activité.
Hormis les bâtiments de l’administration de l’entreprise Perrusson-Desfontaines qui subsistent en bordure du canal du Centre, la villa est le dernier vestige de cette entreprise de transport par voie fluviale devenue entreprise de production de céramique et tuilerie avec des sites de production développés à Ecuisses et Saint-Julien-sur-Dheune en Bourgogne.
Un bâtiment inscrit aux Monuments historiques
La villa Perrusson a été inscrite sur l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques par arrêté du 12 janvier 2001, en raison de l’intérêt d’art et d’histoire suffisant qu’elle présente « pour en rendre désirable la préservation en raison de la qualité et de l’originalité de son décor lié à l’histoire de l’industrie céramique en France ». Cette première protection concerne les pavillons Perrusson et Desfontaines et inclut l’orangerie.
Un deuxième arrêté d’inscription au titre des Monuments historiques est pris en complément en juin 2007. Il porte sur les bâtiments dépendants de la villa et de l’ancienne usine Perrusson, à savoir : le poulailler, les écuries, la serre, les éléments de l’ancienne usine ainsi que le mur de clôture.

Source Creusot Info/  Ecomusée Creusot-Montceau

Aucun commentaire: