Pages

23/05/2015

Loire-Atlantique: À la tuilerie neuve, on a cuit l'argile grâce au bois

Nichée au village de l'Ébaudière, situé à la frontière des communes de La Remaudière et Vallet, la tuilerie neuve de la famille Gouleau a été la dernière du département à fonctionner au bois.
« Dans la commune, on retrouve trace d'un tuilier nommé Calixte Gouleau, dès le recensement de 1872 », précise le Remaudièrois Jean-Pierre Petiteau, passionné par l'histoire locale. « Je me souviens qu'en sortant de l'école, je voulais être embauché dans une boucherie. Mes parents n'étant pas d'accord avec mes goûts, j'ai été obligé de travailler avec eux à la tuilerie », se remémore Calixte Gouleau junior, dont le frère Jean assurera la direction de l'entreprise familiale jusqu'en 1970.
Les hommes passent l'hiver au fond des carrières
« C'est ainsi que tout gamin, après avoir enfilé un morceau de lard et des choux bouillis en guise de petit-déjeuner, je partais allumer le four couché. La fournille (1) était enflammée vers quatre heures du matin. On arrêtait d'enfourner les bûches très tard, dans la soirée. Le four était chauffé à environ 1 000 degrés. On ne pouvait l'ouvrir, que seulement deux jours plus tard, se souvient l'ancien tuilier, qui s'apprête à fêter ses 85 printemps. Une époque pourtant pas si lointaine, où l'on ne comptait pas son temps. »
L'argile était extraite à la pelle et à l'huile de coudes. Qu'il pleuve, neige ou tempête, les hommes passaient, tout l'hiver, installés au fond des carrières, à ciel ouvert. Au fur et à mesure, l'argile est ramenée en tombereau près de la tuilerie. Ensuite, de mars à la Toussaint, place à la fabrication et aux cuissons, durant les beaux jours. « Après avoir piétiné la glaise humide, avec nos pieds pour la rendre malléable, on forme, une à une, les tuiles ou les briques à la main. Beaucoup plus tard, on a utilisé une broyeuse-mouleuse qui faisait les deux opérations simultanément », raconte Calixte Gouleau.
Tuiles, briques et pots de drainage
Long de cinq mètres et haut de deux, le four couché avale indistinctement, deux fois par semaine, ses 5 000 tuyaux de drainage, ses 10 000 briques et autant de tiges de botte (2). Destinées à la région de Saint-Nazaire ou à la future métropole nantaise, les fabrications artisanales et réputées de chez les Gouleau connaissent un énorme succès. « À l'époque, il n'est pas question de palettes ou de chariot élévateur. Les tuiles ou les briques sont chargées à la main, à même dans le tombereau. » Déchargée ensuite à la gare de Vallet ou à celle plus proche du Petit-Anjou, à La Remaudière, la production est acheminée en wagon, au plus près des nouvelles constructions.
« À l'époque de nos parents, toutes les livraisons s'effectuent en voiture à cheval. Deux mille tuiles par chargement et sept heures de voyage en charrette, pour aller et revenir de Vertou, note Calixte, en signalant, quand même, un arrêt du convoi vers le village de Tournebride. Juste le temps de boire une chopine de muscadet et de donner une mesure d'avoine aux chevaux. »
Vers 1920, les 1 000 tuiles étaient vendues 25 francs. La recette est nette, sans TVA et sans impôt. « Même si le travail était très dur physiquement, les plaisirs étaient simples et nous n'étions pas malheureux », conclut Calixte Gouleau, un brin nostalgique. Lui, qui deviendra à 33 ans, un des tout premiers transporteurs au volant de son camion, sera, par la suite, le fondateur des ambulances Gouleau dans le canton de Vallet.
(1) Menu bois et branchages pour chauffer le four.
(2) Tuile ronde traditionnelle.

Source Ouest France

Aucun commentaire: