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31/03/2015

Pourquoi les industriels hésitent à vendre à des fonds

Ils craignent de ne pas céder assez cher et de voir les cadres partants trop bien rémunérés.
Le principe de réalité va s'imposer », veulent croire les fonds dans le dernier processus de vente de Verallia. A l'instar de Saint-Gobain, la maison-mère de Verallia, mais aussi de Lafarge ou de Total, les grands industriels sont réputés ne pas apprécier vendre leurs actifs à des fonds d'investissement. Pour des raisons historiques : plusieurs des cessions opérées durant la bulle de de la dette LBO de 2007, ont fini au tapis. Saint-Gobain Desjonquères (SGD) a été emporté par la crise, restructuré puis tombé dans l'escarcelle du fonds Oaktree. Monier, filiale de Lafarge, plombé par sa dette, a fini dans les bras d'Apollo au terme d'une restructuration de dette musclée. De même Terreal a été contraint à deux restructurations de sa dette.
D'autres groupes, comme Total, utilisent les fonds pour faire monter leurs enchères dans les processus de vente, mais au final évitent de les retenir, en raison des craintes des syndicats sur les répercussions sociales. En réalité, tous les fonds ne sont pas à loger à la même enseigne. Et surtout les industriels peuvent parfois se révéler beaucoup plus radicaux dans les réductions de coûts.
De fait, la réticence des industriels à céder à des fonds tient souvent à d'autres arguments, moins rationnels... et aussi moins avouables. « Il y a souvent la peur de ne pas vendre assez cher, face au professionnalisme des fonds, dit un observateur. Comme ils ont souvent sous-investi dans les filiales qu'ils vendent, ils n'en connaissent pas vraiment la valeur. » Dans ce cas, la meilleure option des fonds est d'offrir à l'industriel de garder une minorité du capital pour profiter de la croissance de valeur. Mais se pose alors un autre problème. Les dirigeants voient d'un mauvais oeil les cadres devenir patrons de ces filiales et s'offrir un généreuse enveloppe de rémunération, gonflée par du variable. « Cela peut poser des problèmes d'alignement en interne avec les autres cadres du groupe », témoigne un banquier.
La vente en 2004 par Alstom de sa division Power Conversion avait défrayé la chronique. La société avait été redressée et revendue par Pierre Bastid, un ancien cadre d'Alstom. Ce dernier s'était alors partagé avec les cadres 700 millions de plus-value quatre ans plus tard... « Ils n'avaient pas vu que sa rémunération n'avait pas été plafonnée », s'amuse un dirigeant de fonds.
Aujourd'hui, dans le processus de vente de Verallia, « les fonds n'ont par forcément intérêt à mettre en exergue des enveloppes de rémunération trop élevées, s'ils veulent lever les réticences de Saint-Gobain », pronostique un banquier.
Source Les Echos par ANNE DRIF

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