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20/12/2014

Romain va travailler comme " non-handicapé " à la tuilerie de Bridoré

Travailleur handicapé, Romain Menezes va quitter son Esat pour être embauché comme un salarié “ normal ” à la Tuilerie de Bridoré.
Romain Menezes est un garçon plutôt réservé. Du moins, c'est l'impression qu'il donne ce jour, lorsqu'il est reçu par le sous-préfet Edmond Aïchoun, en compagnie de son futur employeur, Hubert de Lacote, du directeur de l'Esat de Bridoré Jean-Pierre Rat, ou encore d'Anne-Sophie Marteau, chargée de mission à Cap Emploi (1).
Le jeune homme de 22 ans n'est sans doute pas habitué à être mis sous les feux de la rampe, qui plus est, devant la presse. Mais son histoire est à ce point singulière que le sous-préfet a tenu à la médiatiser. Car au-delà du cas de Romain, c'est tout le regard qui est porté sur le handicap et le monde du travail que le représentant de l'État souhaite voir évoluer.
" Quand je regarde Romain, je me dis : où est le handicap ? "
Depuis trois ans, Romain travaille à l'atelier menuiserie de l'Esat Les Grandes Reuilles, à Bridoré. Cet établissement encadre des personnes handicapées. A titre personnel, Hubert de Lacote a fait appel aux savoir-faire en menuiserie de l'Esat. C'est ainsi qu'il a vu Romain à l'ouvrage. Hubert de Lacote est le patron de la Tuilerie de Bridoré, entreprise artisanale spécialisée dans les tuiles traditionnelles, à l'ancienne. C'est un marché de niche dans la restauration de monuments, de belles demeures, qu'il développe depuis neuf ans avec deux salariés jusqu'à présent. Son entreprise étant en plein essor, Hubert de Lacote a cherché à recruter un employé dans son activité. Sans grand succès. « Il n'existe pas de formation de tuilier traditionnel, dit l'entrepreneur. Je me suis rendu compte que Romain était un bon gars, qui a envie de travailler et qui avait surtout envie de sortir de l'Esat. Pour moi, quand je regarde Romain, je me dis : où est le handicap ? ». Des mots qui ne pouvaient que saluer Edmond Aïchoun : « Votre démarche et votre bonne volonté sont exemplaires », a-t-il déclaré. Romain va intégrer la Tuilerie comme un salarié « valide », avec un CDI à la clef, et non avec un statut de personne handicapée. Ce sera dans quelques jours, une fois les démarches administratives réglées. « C'est un contrat aidé, avec 35 % d'aide de l'État sur la base d'un smic en brut, sur 12 mois, plus une aide de l'Agefiph (2) » souligne le sous-préfet. Hubert de Lacote précise que « Romain sera payé sur 13 mois et demi en fonction de la convention collective » liée à son activité. « Romain passe d'une reconnaissance de travailleur en milieu protégé à une reconnaissance de travailleur classique », apprécie Anne -Sophie Marteau. Pour Jean-Pierre Rat, « la sortie d'un travailleur d'un ESAT pour un emploi en milieu ordinaire est très rare en France, avec moins de 1 % des cas ».
La réussite du cas de Romain ne doit pas faire oublier l'essentiel : « J'accompagne 90 hommes et femmes sur Loches. Ce qui m'alerte, c'est le chômage chez les seniors : 43 sur 98 ont plus de 50 ans », a rappelé Anne-Sophie Marteau.
(1) Réseau national d'organismes de placement spécialisés au service des personnes handicapées et des employeurs. (2) Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées
Source La Nouvelle République par Xavier Roche-Bayard

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