Pages

18/09/2014

Quelles solutions pour relancer le marché immobilier ?

Le secteur du logement est en berne. Les annonces de Manuel Valls sont un bon début, mais d’autres pistes mériteraient d’être approfondies.

Nul ne doute que le marché immobilier français est mal en point. Dans le neuf, les mises en chantier de logements ont chuté de 13,3 % sur un an, les permis de construire ont connu un repli cumulé de 17 % à fin juillet et il est certain que l’objectif tant promis de 500.000 logements ne sera pas atteint dans un futur proche.
Ces chiffres viennent s’ajouter au blocage du marché dans l'ancien. Les premières applications de la loi ALUR (pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, votée en mars dernier) ont des effet pervers. Par exemple, la durée de signature des promesses de vente a été allongée avec l’obligation de fournir, en cas de copropriété, tous les éléments touchant à la vie de l’immeuble. Cette mesure a donné naissance à "une espèce de carcan administratif ingérable" selon Bernard Cadeau, président du réseau d'agences immobilières Orpi.
Par ailleurs, le choix de restreindre le prêt à taux zéro (PTZ) aux achats dans le neuf a exclu depuis 2 ans les primo-accédants de l’accession à la propriété qui préfèrent, dans ces conditions peu propices, rester locataires. Le réseau Orpi a vu les demandes de location exploser, avec une hausse de 50 % au premier semestre.
Besoin de visibilité
Bien que les taux de crédit aient atteint des niveaux record – ils sont au plus bas depuis près de 70 ans –les banques rechignent à prêter. Bernard Cadeau souligne ce paradoxe : "Les banques demandent un apport personnel plus conséquent, ce qui fait qu’un ménage éligible à un crédit de 200.000 euros il y a deux ans ne le sera peut-être plus aujourd’hui, d'autant que les durées d'emprunt son plus courtes". En conséquence, les primo-accédants et les ménages les plus modestes éprouvent des difficultés à entrer sur le marché tandis que les biens de moindre qualité ne trouvent pas acquéreurs.
Du côté législatif, on attend encore les mesures concrètes de simplification qui permettraient de relancer la machine. Le Premier ministre, Manuel Valls, a fait des annonces en ce sens, qui se veulent pragmatiques. Parmi celles-ci, un abattement fiscal exceptionnel de 30 % sur les plus-values des terrains ou encore la possibilité de louer à ses descendants ou ascendants dans le cadre de l'investissement locatif défiscalisé Dfulot-Pinel. Mais le calendrier d'entrée en vigueur reste cependant encore flou.
Or, un projet immobilier a besoin de stabilité, de simplicité et de projection sur l’avenir. Le temps politique est différent. Ainsi, selon les chiffres communiqués par Orpi, 11 % de Français acquéreurs et vendeurs ont un projet immobilier sur le temps court (entre 6 et 12 mois). 67 % des acheteurs disent ne pas avoir de projet et 74 % des vendeurs ne prévoient pas de vendre leur logement (principal, secondaire ou autre).
Sans une intervention rapide et la mise en place de mesures concrètes, le marché va continuer à s’enliser, d’autant que le contexte est particulièrement défavorable à un déblocage : on n’a jamais aussi peu construit qu’en ce moment", résume Bernard Cadeau.
1er acte ur pour relancer le marché : les banques
Selon un sondage réalisé Orpi/Ipsos auprès de 2.012 personnes, 63 % des acheteurs considèrent que les banques sont "plus à même de favoriser l’accession à la propriété". Ce sont également elles qui ont, pour 49 % des Français, le plus d’influence sur le marché immobilier et la meilleure position pour débloquer le marché (45 %).
Les Français ont aussi conscience que les banques sont de plus en plus exigeantes et sélectives dans l’attribution des crédits. 59 % d’entre eux sont d’accord sur ce fait. Les banques sont donc les premières à pouvoir redonner du pouvoir d’achat. La décision de la Banque centrale européenne d’abaisser son taux directeur à 0,05 % pourrait avoir un effet bénéfique, d’autant plus qu’elle a également abaissé le taux des dépôts des banques à - 0,20 %.
2ème acteur pour relancer le marché : le gouvernement
Si 49 % des Français savent que le gouvernement est à l’initiative des lois, ils sont 54 % à penser qu’il est loin de la réalité du terrain.
Et pourtant, le gouvernement arrive régulièrement en 2ème acteur nécessaire pour relancer le marché. Il se place juste après les banques dans le domaine de l’influence sur le marché (15 %) et en 2ème place pour débloquer le marché (34 %). En revanche, le gouvernement est bien loin en ec qui concerne l’accession à la propriété (18 %).
Le sondage montre que les Français considèrent le marché de l’immobilier comme un marché qui se gère seul et qui n’a pas forcément besoin que tout soit normé," explique Bernard Cadeau.
Toutefois, si les solutions pour débloquer le marché immobilier sont additionnées, les actions du gouvernement arrivent en tête avec 60 %. En effet, 26 % des Français considèrent qu’il convient d’aider plus favorablement les primo-accédants, le même pourcentage penche en faveur d’une politique fiscale plus favorable. Enfin, 8% préconisent la simplification des normes. Les banques pourraient instaurer plus de souplesse dans les conditions d’accès au crédit pour 32 % des Français.
Place des vendeurs et des acheteurs
Les acheteurs et les vendeurs occupent une place moindre en ce qui concerne leur capacité à influencer le marché (respectivement 14 % et 7 %). 54 % des Français ont cependant déclaré que les vendeurs possédaient la capacité de débloquer le marché en vendant leur bien au juste prix et 54 % ont conscience que les acheteurs ont le mot final sur la conclusion d’une vente.
L’exclusion de l’ancien
En prenant en compte ces éléments, on comprend que les banques et le gouvernement ont la clé pour renverser la situation. Et que bien que Bernard Cadeau salue les annonces de Manuel Valls, il regrette qu’ "elles s’orientent exclusivement vers le neuf et de ce fait ne pourront engendrer de déblocage rapide". L’ancien représente en effet une mine d’or non-négligeable et le PTZ doit y être étendu, sous conditions bien entendu.
Enfin, Orpi préconise d’explorer d’autres pistes, telles la révision du système d’imposition des plus-values et de la fiscalité du logement, la création d’un statut particulier pour le bailleur privé. Bernard Cadeau propose également l’exonération de droits de succession pour les acquéreurs de logements qui investiront dans les 2 prochaines années en vue de louer.
Source Le Nouvel Observateur par Candide Loouniangou Ntsika

Aucun commentaire: