Les acteurs politiques et financiers ont souvent misé sur
la construction pour relancer la croissance. Mais ces politiques de soutien ne
sont pas sans conséquences – comme le montre la flambée des prix de
l’immobilier observée sur la période 2000-2010 dans de nombreux pays.
« Ces politiques économiques ont souvent un coût élevé.
Aujourd’hui, il devient difficile de les actionner du fait de la dette des
États et des conditions de financement des ménages, » souligne Ludovic Subran,
chef économiste du groupe Euler Hermes. « Le coup de frein sur les politiques
de soutien se fait sentir dans tous les pays développés et de manière
particulièrement aiguë dans les pays du sud de l’Europe. Ces évolutions
confortent le déplacement du centre de gravité du secteur de la construction
vers les pays émergents où les perspectives de croissance sont beaucoup plus
favorables. Pour les entreprises françaises qui n’ont pas accès à ces marchés,
2012 et 2013 seront de nouveau des années de grande vulnérabilité. »
Un faisceau de conditions difficiles
A l’endettement des États et aux prévisions de croissance
économique défavorables des pays développés, s’ajoutent l’augmentation du ratio
de dette hypothécaire des ménages.
Il atteint cette
année 85% du PIB au Royaume-Uni, 76,5% aux Etats-Unis
Les limites de
l’allongement de la durée des prêts, jusqu’à 50 ans en Espagne
En France, la
durée moyenne est de 17 ans, mais 16% des prêts se font désormais sur des
périodes comprises entre 25 et 30 ans
Depuis 2000, les
revenus progressent moins vite que le prix des logements dans la plupart des
pays.
Dans ce contexte économique difficile, les entreprises du
secteur sont aussi confrontées à une baisse de leur rentabilité. Si la
rentabilité des grands groupes européens et américains reste supérieure à celle
des groupes asiatiques, elle s’érode néanmoins année après année. Les groupes
européens ont vu leur rentabilité reculer de 1,4 point en deux ans. Celle des
entreprises françaises est attendue en baisse en 2012 à 3,4% du chiffre
d’affaires.
« Le tissu français du BTP, composé d’une majorité de
petites entreprises, est fragile. Confrontées à une stagnation de l’activité, à
des tensions sur les prix et au coût élevé des matières premières,
certaines entreprises n’ont pas la
solidité financière qui leur permettrait de résister. En conséquence, la
sinistralité, déjà très haute en 2011, va continuer d’augmenter en 2012. Nous
prévoyons en France 15 000 défaillances d’entreprises dans le secteur cette
année,» conclut Didier Moizo, conseiller sectoriel du groupe Euler Hermes.
Légère hausse d’activité en 2012
Toutefois, malgré un environnement peu favorable, en 2012,
l’indice d’activité du secteur de la construction (en volume) est attendu en
hausse de 2% au niveau mondial, grâce au dynamisme des pays émergeants (Chine
+8,9% ; Inde +6,7% ; Brésil +6,6%). Sur la zone euro, en revanche, l’indice est
attendu en baisse (-1,2%), en grande partie à cause des pays méditerranéens : -
2,6% en Grèce et - 4,5% en Espagne où l’explosion de la bulle immobilière
laisse des traces durables. D’autres pays européens affichent encore des
progressions, toutefois modestes : France +0,2% ; Royaume-Uni +0,4%, Allemagne
+0,7%.
Avec un indice en hausse en 2012 (+1,8%), les États-Unis
confirment leur sortie progressive de la crise.
Le rôle moteur des pays émergents
La montée en puissance des marchés des pays émergents, où
les besoins d’infrastructures, d’équipements et de logements restent immenses,
apparaît comme le principal moteur de croissance du secteur de la construction.
A titre d’exemple, le déficit de logements est estimé à 24 millions en Inde. Il
est de 10 millions de logement au Brésil où une grande part de l’habitat urbain
est à reconstruire.
« Beaucoup moins endettés que les pays développés, ces États
ont les moyens de financer de grands projets d’infrastructures et de soutenir
massivement la construction de logements, rendue indispensable par une
urbanisation accélérée, » explique Ludovic Subran. « Ces pays peuvent tabler
sur une bonne croissance dans les années à venir, mais leur PIB par habitant
reste faible. Par ailleurs, le prix des logements ont tendance à augmenter plus
vite que les revenus des ménages. L’accès au crédit et l’évolution des revenus
sont donc cruciaux pour la croissance du marché de la construction de
logements. »
Relais de croissance
Au-delà de la dynamique des pays émergents, le secteur de la
construction peut trouver des relais significatifs de croissance.
Il s’agit d’une
part de l’application des normes environnementales visant à réduire les
émissions de CO2 et à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments; ce
marché représente un potentiel de 550 milliards de dollars, sachant que le
surcoût d’un bâtiment HQE est de 15%.
Un deuxième
relais réside dans la rénovation du parc existant. 80% des bâtiments ne sont
pas aux normes environnementales et le parc de certains pays est très dégradé
(75% des bâtiments existants en Russie et 40% en Pologne).
Euler Hermes
constate que la construction de locaux commerciaux et administratifs redémarre
en Europe de l’ouest (+ 7% au premier trimestre 2012).
Ses événements
exogènes contribuent aussi à stimuler la construction, tels que la coupe du
monde de football 2014 et les jeux olympiques 2016 au Brésil, ou les jeux
olympiques d’hiver 2014 en Russie.
Source
Euler Hermès
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