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14/05/2012

Une maison 100% terre cuite


Matériau sain, historique et empreint de régionalisme, la terre cuite réaffirme son engagement fort pour respecter la planète. Des murs à la toiture, en passant par la décoration, on peut construire sa maison entièrement en terre cuite. Responsable bâtiment durable pour Terreal. Isabelle Dorgeret est titulaire d’un diplôme d’ingénieur en chimie des matériaux, option céramiques et verre de l’IST. En 2007, elle rejoint le groupe Terreal afin de répondre à la logique de la vision stratégique du Groupe : la conception globale de la construction.
Briques monomur, linteaux, brise soleil, tuiles... la terre cuite facilite la labellisation basse consommation de par ses qualités thermiques.

Quel est le métier historique de Terreal ? 

Isabelle Dorgeret : Le groupe Terreal est issu de la fusion entre trois importants tuilliers-briquetiers français : Lambert, TBF et Guiraud, dont l’ancienneté remonte au XIXème siècle. Il va sans dire que le groupe est ancré dans les territoires locaux et dans l’histoire. Disséminé en 16 sites industriels, une usine de tuiles n’a de sens que si elle se situe dans l’environnement immédiat d’une carrière, pour être au plus proche de la matière. La tuile est constituée de 100 % de matière minérale, avec une composition de 70 % d’argile et de 30 % de sable.

Le procédé de fabrication est aujourd’hui industrialisé, mais les tuiles mécaniques sont fabriquées de la même manière depuis le milieu du XIXème siècle, grâce aux Frères Gilardoni. L’argile et le sable sont mélangés avec de l’eau, puis la forme désirée est obtenue par extrusion. Certaines tuiles comme celle de Marseille, qui possède un relief particulier, nécessitent une pression supplémentaire. Pour certains aspects vieillis type Monuments Historiques, un traitement colorant peut lui être appliqué avec un mélange d’argile fine et de pigments minéraux. Il s’agit d’un engobe, jeté à même la matière sous forme de poudre. Pour les couleurs plus foncées, la teinture peut se faire directement dans la masse avec des oxydes de minéraux. La terre cuite doit subir le phénomène de céramisation avec une cuisson allant de 900 à 1100°, température qui dépend de l’origine de l’argile. Aujourd’hui, la seule fabrication artisanale, qui subsiste, concerne les tomettes.

Le groupe Terreal se situe à la croisée de trois grands marchés : la couverture - hormis la charpente - (les tuiles, mais aussi les parties métalliques pour le faîtage, les accessoires photovoltaïques, les souches de cheminée), la structure (briques de mur et de partition), la façade et la décoration (parements seconde peau, margelles de puits, murets, pilastres, piliers).

Comme à la Cité Internationale de Lyon dessinée par Renzo Piano, le bardeau rouge à double paroi en terre cuite est fixée à l’aide de pattes agrafes spécifiques en tôle inox sur des profilés verticaux métalliques.


Quels sont les avantages de la terre cuite? 

I.D. : Le souci du développement durable est au cœur de la terre cuite, puisque l’argile est une source inépuisable de la croûte terrestre, issue de sa dégradation. Les usines sont proches des carrières, afin de faciliter le transport, ce qui permet de limiter l’apport de CO2. L’origine de l’argile joue un rôle sur la coloration du produit, ce qui permet d’offrir une diversité régionale, avec des aspects particuliers. Ainsi, la présence forte de calcaire dans la région de Toulouse donne une argile aux tons rosés, coloration est typiquement locale. L’émaillage, appliqué uniquement sur la face destinée à être vue, permet également une gamme plus diversifiée de couleurs. La durabilité du produit est un de ses grands points forts, puisque des bâtiments de plus de quatre mille ans sont encore debouts, en Inde par exemple. Plus proche de nous, la cathédrale d’Albi est elle-même construite en briques de terre cuite rose. Pour autant, l’inconvénient réside dans son procédé de fabrication, puisque la fabrication d’une tuile oblige à une cuisson, ce qui signifie consommation d’énergie.

Avec le nouveau Ton Pierre, coloris clair et lumineux, Terreal décline toute sa gamme pour construire et décorer dans une même harmonie.



L’intérêt d’une maison entièrement construite en terre cuite ?

I.D. : La terre cuite est poreuse, ce qui permet à la maison de respirer, évitant les problèmes de condensation (contrairement au parpaing). Elle constitue une enveloppe cohérente, qui garantit peu de risques de générer des points froids, et donc une perte d’énergie. La rectification du produit, lors de la mise en œuvre, permet de limiter les ponts thermiques, grâce à un mortier-colle spécifique. Les accessoires sont étudiés de manière à assurer l’imperméabilité de la maison, que ce soit lié à l’air autour des fenêtres, à la jonction entre deux étages ou aux coffres de volets roulants. D’autre part, la terre cuite possède un avantage de taille en été, puisqu’elle permet de conserver la fraîcheur de la maison, afin qu’elle ne se transforme pas en étuve. Le développement de moisissures est également limité, voire inexistant. La maison devient naturellement bioclimatique. En outre, tous les composés organiques sont éliminés lors de la cuisson (contrairement au bois). Enfin, le prix de la terre cuite reste relativement bas.

Brique à maçonner, briquette de parement, le Ton Pierre est décliné en deux textures différentes, lisse ou sablée.



Votre gamme décorative et décoration ?

I.D. : La décoration est une gamme qui se développe depuis quelques années. Terreal met l’accent sur la création d’ambiances, à partir d’un jeu sur des couleurs et de formats, qui s’adaptent aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de la maison.

S’il n’existe pas de procédé de rectification pour les carreaux, celui-ci est possible pour les briques, permettant ainsi des joints ultra-minces. Mais l’éventail de la gamme de coloris de joints permet d’apporter le cas échéant un effet d’harmonie ou de contraste avec la terre cuite.

Conçue dans une dimension plus contemporaine, avec des coloris inédits jouant sur l’irisé et le métallisé et permettant d’harmoniser sa toiture avec des panneaux solaires, la tuile Quartz.



Que recherchez-vous avec l’intervention de designers comme Christelle le Déan ?

I.D. : Avec le centre de recherche, nous avons lancé une réflexion sur ce que pourrait être la toiture idéale. De ces discussions, la tuile Quartz a été conçue dans une dimension plus contemporaine, avec des coloris inédits qui joue sur l’irisé et le métallisé, permettant d’harmoniser sa toiture avec des panneaux solaires. Nous avons également réalisé une collaboration avec Martin Szekely, designer à la renommée internationale. En est issue la tuile Z, qui fut la première tuile exposée au Centre Georges Pompidou.

Esthétique à l'ancienne et tonalités vieillies pour ce toit en tuiles écailles.



Votre position sur le thermique et le photovoltaïque?

I.D. : Depuis 2007, Terreal tente d’anticiper la Réglementation Thermique de 2012, et nous prévoyons déjà la prochaine de 2020. Il s’agit de se demander ce que signifie le terme « maison positive », car il est nécessaire d’englober les 5 points de la RT (c’est-à-dire le chauffage, l’éclairage, la climatisation, l’eau et la ventilation) avec l’énergie de la vie quotidienne. Même une maison parfaitement écologique devra compenser le système d’eau chaude et la ventilation.

Pour être positive, la maison devra produire davantage d’énergie qu’elle n’en consomme, ce que propose Terreal avec ses panneaux photovoltaïques, optimisant les besoins. Positionné sur le versant sud d’une toiture, le panneau capte la lumière, pour la transformer en énergie. Mais afin d’assurer un meilleur apport, il se doit impérativement d’être de couleur noire, ce qui n’est pas nécessairement très esthétique sur une toiture en pente. L’intégration sera plus réussie avec de l’ardoise par exemple, ou une terre cuite de couleur sombre. Mais il faut savoir que l’intégration du panneau à la maison ou à la toiture, engendre nécessairement un moins grand nombre de tuiles, provoquant une fuite énergétique, responsable de ponts thermiques. Dernier point qui a son importance, l’intérêt pour le particulier est de revendre l’intégralité de son surplus d’électricité à EDF qui rachète les KW dans d’excellentes conditions.

Bardeau double peau et brise-soleil en terre cuite pour le lycée Germaine Tillion, à Sain Bel dans le Rhône, garanties d’une excellente inertie et protection thermiques.



Tuiles et innovation?

I.D. : Grâce à son département Recherche et Innovation, Terreal a mis au point des brise-soleil, avec la possibilité d’y intégrer des capteurs photovoltaïques, ce qui permet de modifier instantanément l’orientation des volets selon l’intensité du soleil. Ce type d’innovation permet d’éviter l’effet fournaise que la RT 2012 a tendance à créer, en imposant la construction de bâtiments compacts.

Quelques chantiers spectaculaires?

I.D. : La Cité Internationale de Lyon, par exemple, a demandé une vingtaine d’années pour voir sa réalisation. Renzo Piano a construit un complexe gigantesque, à partir d’une tuile d’une couleur rouge particulière qu’il a lui-même dessinée. La forme allongée de l’édifice au bardage large permet de mettre en avant le matériau de « terre cuite ». Pour ce chantier, l’architecte a demandé à Terreal de développer ce produit spécifique qui, aujourd’hui, fait partie de la gamme.

Second exemple : dans la banlieue de Toulouse, une maison bioclimatique a été réalisée entièrement en collaboration avec Terreal. Les propriétaires du lieu avaient déjà réalisé une maison à ossature bois, mais ils n’étaient pas entièrement satisfaits à cause d’une impression de fournaise en été. C’est donc logiquement qu’ils se sont tournés vers la terre cuite, permettant d’apporter de la masse, avec une inertie amplifiée pour conserver la fraîcheur des lieux. La terre cuite permet de répondre à la double problématique de l’hiver et de l’été. La maison est assurée basse consommation, avec une performance autour de 39,55 kWhep/m2/an.

Un projet de lotissement de maisons à Saint-Denis fut également un sujet intéressant pour Terreal. Il s’agissait de construire des logements à un prix de construction au mètre carré très faible, aux alentours de 1 300 €. Avec l’architecte, Sabi Bendimérad, nous avons réalisé des briques à hauteur d’étage, extrudées à 90 cm x 2,50 mètres ; seul Terreal est en mesure à ce jour de réaliser des modules de ce format. Le système constructif est juxtaposable, comme dans une version Lego géant, limitant ainsi les coûts de mise en œuvre. Fabriquées dans le sud de la France, ces briques XXL sont laissées apparentes, afin de mettre en valeur le matériau des façades.

 Aller de l’avant, innover et se remettre en question, tel est le credo de Terreal qui n’hésite pas à s’appuyer sur la créativité d’architectes et designers audacieux, dans le but de détourner la terre cuite avec de nouvelles propositions d’avant-garde.
Source Maison.com  par Christian de Rivière

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