Adler Technologies frappe à toutes les portes
Pas le choix. Depuis qu'il a repris la société en 2009, Yann Jaubert le PDG d'Adler Technologies, qui fournit des usines clés en main dans la construction, a dû trouver des débouchés en dehors du marché européen. « La crise nous a obligés à aller chercher nos clients », résume-t-il. Première cible : le Brésil. Sans capacité d'autofinancement, il a fait le tour des dispositifs de soutien publics. De la région Picardie, il a obtenu des subventions pour la création d'un poste de commercial sur la zone et la participation à des salons. Il a aussi bénéficié de l'assurance prospection de la Coface. Il ne commencera à la rembourser que dans quatre ans. Il a aussi obtenu une garantie d'Oséo sur les fonds propres de sa filiale. Sur la première année, 300 000 des 400 000 euros engagés ont été couverts par ces dispositifs. Les aides atteignent près de 65% de l'investissement. « Cela représente une avance de trésorerie intéressante », assure le PDG, qui évalue à 1,5 million d'euros le coût de son aventure brésilienne. Une aventure qui paye. Après un an, la filiale est déjà presque à l'équilibre. Conséquence : la PME, qui réalise un chiffre d'affaires de 30 millions d'euros et emploie 150 personnes, finalise la création d'une filiale en Russie, avec le soutien financier des mêmes partenaires. « C'est ce qui nous permet de nous en sortir, jure Yann Jaubert. Si on a fait 25% d'activité en plus l'an dernier, c'est grâce à l'export. »
Conquérir des marchés à l'étranger est un impératif pour les PME.
Encore faut-il avoir les moyens de ses ambitions. Les soutiens, publics
ou privés, abondent.
Où se trouve la croissance en 2012 ? Pas en France, car l'activité
devrait stagner dans de nombreux secteurs. Beaucoup d'industriels
peuvent donc espérer trouver leur salut en conquérant des marchés à
l'international. Mais pour exporter, encore faut-il disposer de moyens
financiers suffisants. Et il faut parfois attendre des années avant
qu'un développement à l'international ne soit rentable. Difficile de
tout financer sur ses fonds propres. « Il existe une panoplie assez vaste d'aides pour financer les démarches export des PME, détaille André Lenquette, le directeur du cabinet de conseil Pramex international. Certaines peuvent même être cumulées.
» Pour y prétendre, il faut bien connaître les acteurs du développement
international. Pour accompagner les PME, des guichets uniques à
l'export commencent à se structurer au niveau régional. Quelques
régions, dont l'Auvergne, s'y sont mises. Petit guide pour s'y
retrouver.1. Définir ses ambitions
Règle de base : plutôt que de se lancer tête baissée, mieux vaut calibrer sa stratégie. Trop ambitieux, le projet nécessitera trop de cash et risque d'être abandonné avant que l'effort ne porte ses fruits. Or l'export, ça coûte cher. En moyenne, 500 000 euros sur trois ans peuvent suffire pour pénétrer un marché en Europe ou au Maghreb. Plus loin, il faut compter au moins 1 million. Il est indispensable aussi de définir une stratégie pour optimiser les aides publiques possibles. Ainsi, l'assurance prospection de Coface n'est accordée qu'une fois par zone géographique. La demander pour tout le Maghreb, par exemple, prive de la possibilité d'y recourir plus tard sur ce territoire. « C'est l'un des intérêts de faire appel à ces outils publics, assure Philippe Eyraud, le PDG de Mixel, un fabricant d'agitateurs industriels. Demander une aide oblige à réfléchir à son projet. Il faut s'engager sur des chiffres de budget, de retour sur investissement. » Prouver que l'on sait où l'on va permet de décrocher le meilleur soutien des organismes publics. Et évite de voir les financements interrompus au bout d'un an pour non-respect du business plan. « Il faut prouver que l'on est crédible », confirme Cécile Richard, la gérante export de Caplain machines, un spécialiste du matériel des métiers de bouche qui réalise 65% de son chiffre d'affaires à l'international.
2. Solliciter un prêt « patient »
L'export peut être à l'origine de dépenses étonnantes. Pour vendre ses fours de boulangerie en Afrique, Caplain Machines a dû investir pour produire des appareils sans électronique... il y a vingt ans. Afin de financer cette adaptation, la PME a sollicité un prêt d'Oséo. Mais elle a d'autres projets, notamment en Asie du Sud-Est. Elle a reçu d'Oséo 150 000 euros pour y réaliser sa prospection. Pour soutenir le développement à l'international, la banque des PME propose des prêts « patients », dont le remboursement est différé d'un an. Le prêt pour l'export (PPE), plafonné à 150 000 euros et remboursable en six ans, permet de couvrir les frais de l'export. « C'est de la trésorerie pour payer les déplacements, mais aussi adapter ses catalogues et avoir des tarifs bilingues », détaille Cécile Richard, de Caplain machines. Le PDG de Mixel, lui, a financé grâce à un PPE l'apport de capital pour sa filiale brésilienne. Pour les projets de plus grande envergure, Oséo dispose de deux autres outils : le contrat de développement international (CDI) - un prêt sans garantie à concurrence de 300 000 euros -, et le contrat de développement participatif (CDP) - il peut financer l'augmentation des besoins de fonds de roulement (BFR) liée à la démarche export jusqu'à 3 millions d'euros avec un remboursement différé de deux ans.
3. Prendre une assurance
Une autre option consiste à contacter la Coface, qui a mis en place l'assurance prospection. Le principe : l'entreprise s'assure contre le risque d'échec de sa stratégie. Elle ne rembourse les fonds que lorsqu'elle génère du chiffre d'affaires. En cas d'échec, le dispositif s'apparente à une subvention. En 2011, environ 7 000 PME en ont bénéficié. Pour augmenter ce nombre, le dispositif a été simplifié depuis janvier, avec l'assurance prospection premier pas en dessous de 30 000 euros. « Contrairement à un prêt, on ne regarde pas le niveau d'endettement de l'entreprise mais la probabilité de réaliser du chiffre d'affaires », souligne Christophe Viprey, le responsable de la délégation services publics de la Coface. Mixel a appris à jongler avec les deux dispositifs. Pour tester le marché en Turquie, un pays qu'il découvre, Philippe Eyraud a décidé de recourir à l'assurance pour couvrir ses dépenses. Mais il ne l'utilise pas en Algérie et en Chine : dans ces pays, il dispose déjà d'un courant d'affaires. « Nous voulons y amplifier notre présence, mais nous dégageons déjà un petit chiffre. Prendre une assurance prospection ne serait pas intéressant, car nous serions amenés à la rembourser presque aussitôt », souligne le PDG de la PME. Mixel s'est en revanche tourné vers d'autres dispositifs d'assurance distribués par Oséo pour limiter le risque engendré par la création de sa filiale commerciale au Brésil. Si elle venait à faire de mauvaises affaires, l'entreprise est assurée de récupérer 50% des fonds propres apportés. Un dispositif avantageux mais méconnu.
4. Faire le tour des subventions
Autre piste pour réduire la facture : rechercher les subventions. Les
régions ont mis en place des dispositifs pour soutenir les démarches
export des PME, mais le soutien apporté varie de façon importante. En
général, les aides sont concentrées sur le recrutement de chargés
export. Notamment pour financer le volontariat international en
entreprise (VIE), un contrat ciblé pour les jeunes diplômés. Le soutien
peut aller de 80% du coût global du VIE à 10 000 euros dans le Nord -
Pas-de-Calais ou rien en Rhône-Alpes. Certaines régions ont aussi mis en
place des subventions pour la participation à des salons ou à des
missions collectives. En revanche, les aides Sidex, gérées par
Ubifrance, ont été supprimées en début d'année.5. Renforcer ses fonds propres
Netfective Technology, un éditeur de logiciels, a adopté une autre stratégie. Le groupe de 130 personnes, qui prend pied en Inde et a déjà engrangé des commandes aux États-Unis, a fait appel à Capital export, un fonds d'investissement spécialisé sur les PME exportatrices. L'avantage ? Un effet de levier bien plus important. « Les outils publics sont limités à quelques centaines de milliers d'euros, alors qu'un fonds comme le nôtre peut apporter entre 2 et 5 millions d'euros », souligne Jean-Mathieu Sahy, le directeur du fonds. Dans le cas de Netfective, la société devait impérativement financer son BFR, après avoir décroché deux énormes contrats avec des grands comptes. En général, les fonds d'investissement sont friands de PME offensives à l'export, un gage de bon retour sur investissement en cas de réussite. Les primo-exportateurs ont en revanche moins de chance d'attirer un investisseur. Jean-Mathieu Sahy ne tourne pas autour du pot : « Nous avons des contraintes de rendement financier, nous avons tendance à privilégier les entreprises dont la stratégie export est déjà engagée. » Pour le dirigeant de Capital export, les dirigeants de PME qui découvrent l'international vont devoir « apprendre » l'export pendant deux ou trois ans, avec des ratés bien souvent. Pour renforcer leurs fonds propres, ils peuvent toujours frapper à la porte d'Oséo... qui distribue des quasi-fonds propres.
Source L'Usine Nouvelle par SOLÈNE DAVESNE
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire