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15/01/2017

Pierre Legris, fondateur de Legris Industries

Il avait fondé un petit empire industriel. Pierre Legris, créateur de Legris Industries, est décédé vendredi 30 Décembre, à Rennes. Il avait quatre-vingt-huit ans.
C'est en 1948, après l'obtention de son diplôme d'ingénieur des Arts et Métiers, que ce futur capitaine d'industrie a rejoint le petit atelier familial parisien, initialement spécialisé dans les lampes pour fiacres. Devenu président en 1960, il a ensuite lancé la PME dans la robinetterie, une activité à l'origine de son décollage. De l'alimentation électrique aux équipements industriels, le groupe, dont le siège est désormais à Bruxelles, compte aujourd'hui plusieurs activités, une quinzaine d'usines et 1.400 salariés. « Mon père était un visionnaire, raconte Pierre-Yves Legris, son fils aîné, président du conseil de surveillance de Legris Industries. Il a très vite compris qu'il fallait absolument internationaliser l'entreprise, la diversifier et l'engager dans la R&D afin d'innover. »
Dans les années 1970, Pierre Legris, amoureux de la Bretagne et époux d'une Bretonne, a transféré ses activités à Rennes sur les conseils de l'universitaire Claude Champaud dont il était très proche. « Il pensait qu'il n'avait aucun intérêt à rester dans la capitale et qu'il serait beaucoup mieux soutenu en province. Je l'ai aidé à installer son siège social dans la capitale bretonne et à trouver des locaux pour une usine. Les élus voyaient tous d'un bon oeil l'arrivée de cet industriel », se souvient Claude Champaud, longtemps resté conseiller juridique de cet homme d'affaires, toujours élégant, qui s'est rapidement impliqué dans les réseaux patronaux.
Après avoir occupé la présidence de l'Union des entreprises d'Ille-et-Vilaine (Medef), Pierre Legris a pris, en 1990, celle d'Ouest Atlantique à Nantes. Emanation de la Datar et des régions de l'Ouest, cette association, aujourd'hui dissoute, avait notamment pour ambition d'accompagner le renforcement industriel de la Bretagne, des Pays-de-la-Loire et de Poitou-Charentes. « Pierre Legris était un véritable entraîneur. Il savait convaincre les élus dans ses objectifs de développement économique », indique aux « Echos », l'ancien ministre de la Justice et actuel maire de Vitré, Pierre Méhaignerie, qui a côtoyé de près le dirigeant en présidant le conseil général d'Ille-et-Vilaine.
Pierre Legris a quitté la direction du groupe qui porte son nom en 1988. A soixante ans. « Trop tôt », disent certains. « Il disait qu'il avait beaucoup travaillé et voulait faire autre chose. Il n'était pas du genre à se retourner sur le passé », précise son fils. Les rênes de l'entreprise ont été confiées à son bras droit, l'ancien député RPR, Yvon Jacob, et à Pierre-Yves Legris qui, en 1986, a introduit en Bourse le groupe retiré de la cote en 2004 pour revenir dans le giron familial. « Pierre Legris, dit encore Claude Champaud, était un battant qui savait garder son sang-froid dans toutes les circonstances. Il a su, par exemple, donner à son groupe une nouvelle dimension avec le rachat en 1987 des grues Potain. » L'entreprise sera revendue en 2001 au nord-américain Manitowoc Company moyennant la coquette somme de 344 millions d'euros.
Six enfants, 31 petits-enfants
Après avoir lâché la barre de son groupe et développé Potain, Pierre Legris a pris le large. Et ce passionné de mer de faire aux côtés de son épouse Francette un tour du monde à bord d'un voilier de 23 mètres de long qu'il avait fait construire spécialement à La Rochelle.
Père de six enfants, grand-père de 31 petits-enfants et 16 fois arrière-grand-père, ce patron que ses proches décrivent comme « un catholique à très forte éthique » « a aussi aidé, en toute discrétion, beaucoup de personnes en difficulté », insiste son fils aîné.
Il laisse derrière lui un groupe industriel diversifié et ayant su surmonter des tempêtes. En 2010, Legris Industries a dû faire face à la liquidation en France de Ceric Automation, sa division, rebaptisée Keria et spécialisée dans les lignes de production de tuiles. Deux ans plus tôt, il s'était séparé de ses activités de raccords de plomberie vendues à l'américain Parker. En 2014, il a fermé son siège social de Rennes pour le transférer en Belgique. Aujourd'hui, le groupe, de nouveau en croissance, répartit ses activités de « niches industrielles » entre la fabrication de machines d'extrusion, d'usines de briquetteries, la logistique et l'alimentation électrique. Son fondateur sera inhumé ce mercredi dans la station balnéaire de Sarzeau, où il aimait tant se rendre chaque été.
Source  Les Echos par Stanislas du Guerny

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