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15/01/2017

FIMEC en 2010 - Décision de justice en 2016. « Quand j’y pense, j’ai honte à ma France »

La justice ? « Quand j’y pense, j’ai honte à ma France. »

Pour moi, 2016 c’était ça. Le combat des ex de la Fimec touchait à sa fin. Mené par André Bousseau, ancien salarié au grand cœur et au sens de la justice bien accroché.
Début d’après-midi d’automne dans la campagne, entre Le Pin-en-Mauges et Sainte-Christine. André Bousseau, 63 ans, m’avait reçu chez lui autour de la table de la cuisine, avec un café bien chaud.Rendez-vous avait été pris quelques jours auparavant pour évoquer la Fimec, ou plutôt 150 ex-salariés licenciés six ans plus tôt. Les comptes de cette entreprise réputée dans le monde entier pour ses automatismes industriels s’étaient brutalement effondrés après son rachat par Keyria, une filiale du Groupe Legris Industries (1).
Tout perdre ?
Le feuilleton judiciaire, entamé en 2010, touchait doucement à sa fin. La cour d’appel d’Angers avait bien reconnu que ces licenciements étaient dénués de cause réelle et sérieuse. Mais le paiement des indemnisations revenait à un organisme public, et non au Groupe Legris Industries. C’est cette décision qui avait révolté André Bousseau. Avec ses anciens collègues, ils devaient décider de se pourvoir en Cassation. Ou pas. Sachant qu’ils risquaient de tout perdre.
Cette rencontre, je l’avais sollicitée. Ce n’était de toute façon pas le genre de cet ancien agent de maîtrise de se pousser du col dans les médias. Je voulais juste comprendre qui était cet homme. Ce qui le poussait à consacrer des heures à défendre les ex de la Fimec, à les rassurer, les informer, les conseiller. Le tout bénévolement, et en sacrifiant un peu de sa vie de famille et de retraité, qu’il était depuis janvier 2015.
Les mots sont durs
Pas d’esbroufe chez André Bousseau. La gloire, les lauriers, les gros titres dans les journaux très peu pour lui. S’il a accepté la rencontre, c’est pour dire sa « colère contre l’injustice ». Une colère froide. Les mots sont durs, l’ex-délégué du personnel tape, et fort. L’administrateur judiciaire ? « Faut pas les côtoyer ces gens-là. » La justice ? « Quand j’y pense, j’ai honte à ma France. » Legris Industries ? « Maintenant, ils se cachent au Luxembourg ou en Belgique. »
Ce 14 novembre, lorsque nous nous sommes rencontrés, André Bousseau ne savait pas encore si quelques-uns de ses anciens collègues accepteraient de le suivre en Cassation.Finalement, quelques jours plus tard, tous ont renoncé. La mort dans l’âme. Cette ultime démarche judiciaire pouvait leur faire tout perdre. Soit entre 15 000 et 20 000 € selon les cas. Trop risqué.André Bousseau sera allé au bout de ce qu’il pouvait faire. Sans regret. Il me reste l’image de ces gens des Mauges : travailleurs, solidaires, durs à la tâche, attachés à leur terroir et leur entreprise.
Faire un peu de jardin
Le portrait de l’ancien de la Fimec, paru dans notre édition du 22 novembre, n’a pas été si simple à coucher sur le papier. Il y avait tant à dire, et forcément trop peu de place dans nos colonnes pour écrire le combat de cet homme truculent, défendant de belles valeurs. Et attachant avec ça. C’est une biographie qu’il mériterait. Mais je suis journaliste dans un quotidien, avec, chaque jour, son lot d’actu.
Aujourd’hui, la Fimec est derrière lui. Il peut profiter un peu plus de sa petite fille, qui a eu trois ans il y a quelques semaines. « Et puis, j’ai un de mes gars qui est en train de rénover sa maison, je vais pouvoir lui donner un coup de main. » Dans le coin, il y a aussi « le frangin et les beaux-frères ».Et aux beaux jours, André Bousseau retournera « faire un peu de jardin ». »
(1) Créé en 1986, le Groupe Legris Industries est un groupe industriel, à l’actionnariat principalement familial.
Source Ouest France par Vincent COTINAT

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